Conserves

Une semaine, un mois passent et nous commençons à nous faire à l’idée que Teresita sera en avance sur nos plans. Je vais devoir renoncer à ma bourse d’études parce que dans quelques mois, ce ne sera plus facile de suivre. Peut-être pas tant à cause de Teresita que par pure anxiété, je ne peux pas m’arrêter de manger et commence à grossir. Manuel m’apporte le repas à mon fauteuil, au lit, au jardin. Tout bien organisé sur le plateau, propre dans la cuisine, fourni dans les placards, comme si la culpabilité — ou que sais-je d’autre — l’obligeait à faire ce que j’attends de lui. Mais il perd ses forces et ne semble pas heureux : il rentre tard à la maison, ne me tient pas compagnie, ne veut pas parler de tout cela.

Un autre mois passe. Maman aussi se résigne, nous achète quelques cadeaux et nous les donne — je la connais bien — avec une pointe de tristesse. Elle dit :

— Ça c’est une table à langer lavable avec fermeture Velcro... Là ce sont des chaussons pur coton... Et ça c’est une cape de bain en nid d’abeille..., papa regarde toutes les choses qu’ils nous offrent en acquiesçant.

— Ah, je ne sais pas..., dis-je sans savoir si je fais référence au cadeau ou à Teresita. À vrai dire, je ne sais pas, dis-je plus tard à ma belle-mère lorsqu’elle arrive avec un jeu de petits draps de couleur, je ne sais pas, dis-je sans savoir quoi ajouter, puis je serre les draps contre moi et me mets à pleurer.

Le troisième mois, je me sens encore plus triste. Chaque fois que je me lève, je me regarde dans le miroir et reste ainsi quelques instants. Mon visage, mes bras, tout mon corps, et par-dessus tout mon ventre sont de plus en plus enflés. Parfois, j’appelle Manuel et lui demande de se tenir à côté de moi. Lui, en revanche, je le trouve de plus en plus maigre. D’ailleurs, il me parle de moins en moins. Il rentre du travail et s’assoit devant la télévision en se tenant la tête. Pas parce qu’il ne m’aime plus ou qu’il m’aime moins. Je sais que Manuel m’adore et je sais que, comme moi, il n’a rien contre notre Teresita, qu’est-ce qu’il pourrait avoir contre elle. Mais il y avait tant à faire avant son arrivée.

Parfois, maman demande à caresser mon ventre. Je m’assieds dans le fauteuil et elle, d’une voix douce et tendre, raconte des choses à Teresita. La maman de Manuel, quant à elle, appelle à tout moment pour savoir comment je vais, où je suis, ce que je mange, comment je me sens et tout ce qui peut lui passer par la tête.

J’ai des insomnies. Je passe mes nuits sans dormir, dans le lit. Je regarde le plafond, les mains posées sur Teresita. Je n’arrive pas à penser à autre chose. Je n’arrive pas à comprendre comment, dans un monde où se passent des choses qui me paraissent aussi merveilleuses que louer une voiture dans un pays et la restituer dans un autre, sortir du congélateur un poisson frais, mort depuis plus de trente jours ou payer des factures sans sortir de chez soi, une affaire aussi anodine qu’un petit changement dans le cours des événements soit insoluble. Je ne peux tout simplement pas me résigner.


Je laisse alors de côté le guide pratique de la sécurité sociale et cherche d’autres alternatives. Je consulte des obstétriciens, des guérisseurs et même un chaman. Quelqu’un me donne le numéro d’une sage-femme et je lui téléphone. Mais chacun à sa manière me présente des solutions conformistes ou perverses qui n’ont rien à voir avec ce que je cherche. J’ai du mal à me faire à l’idée d’accueillir Teresita si tôt, mais je ne veux pas non plus lui faire de mal. C’est alors que je rencontre le Docteur Weisman.

Le cabinet est situé au dernier étage d’un vieil édifice du centre. Il n’a pas de secrétaire, ni de salle d’attente. Seulement un petit hall d’entrée et deux pièces. Weisman est très aimable, il nous fait entrer et nous offre du café. Au cours de la conversation, il s’intéresse tout spécialement au type de famille que nous formons, à nos parents, à notre couple, aux relations particulières entre chacun de nous. Nous répondons à tout ce qu’il nous demande. Weisman croise les mains et les pose sur le bureau, il semble approuver notre profil. Il nous parle un peu de sa trajectoire, du succès de ses recherches et de ce qu’il peut nous proposer, mais il comprend qu’il n’a pas besoin de nous convaincre et commence à nous expliquer le traitement. De temps en temps, je regarde Manuel : il écoute attentivement, acquiesce, semble enthousiasmé. Le programme inclut des changements dans l’alimentation, le sommeil, des exercices de respiration, des médicaments. Il va falloir parler avec papa et maman ainsi qu’avec la mère de Manuel ; leur rôle aussi est important. Je note tout dans mon carnet, point par point.

— Et quelle certitude avons-nous avec ce traitement ? lui dis-je.

— Nous avons tout ce qu’il faut pour que tout se passe bien, dit Weisman.

Le lendemain, Manuel reste à la maison. Nous nous asseyons à la table du salon, entourés de questionnaires et de papiers, et commençons à travailler. Nous écrivons le plus fidèlement possible comment se sont présentées les choses depuis le moment où nous avons soupçonné que Teresita était en avance. Nous donnons rendez-vous à nos parents et nous sommes clairs avec eux : la décision est prise, le traitement en route et il n’y a rien à discuter. Papa est sur le point de demander quelque chose mais Manuel l’interrompt :

—Vous devez faire ce que nous vous demandons, dit-il. Je comprends ce qu’il ressent : nous prenons cela au sérieux et nous attendons la même chose des autres, à l’heure et au moment voulus.

Ils sont inquiets et je crois qu’ils ne parviennent pas à comprendre de quoi il s’agit, mais ils s’engagent à suivre les instructions et chacun rentre chez lui avec une liste.

Lorsque les dix premiers jours prennent fin, la mécanique est un peu mieux huilée. Je prends mes trois cachets quotidiens à l’heure et je respecte toutes les séances de « respiration consciente ». La respiration consciente est l’élément fondamental du traitement et c’est une méthode innovante de relaxation et de concentration, découverte et transmise par Weisman lui-même. Dans le jardin, sur la pelouse, je me concentre sur le contact avec « le ventre humide de la terre ». Je commence par inhaler une fois et par exhaler deux fois. J’allonge les durées jusqu’à inspirer pendant cinq secondes et expirer en huit. Après plusieurs jours d’entraînement, j’inhale en dix et exhale en quinze ; je passe alors au deuxième niveau de respiration consciente et je commence à sentir le sens de mes énergies. Weisman dit que cela va me prendre un peu plus de temps, mais il soutient que l’exercice est à ma portée et que je dois continuer à travailler. Il arrive un moment où il est possible de percevoir la vitesse à laquelle l’énergie circule dans son corps. On ressent comme un léger chatouillement qui apparaît généralement dans les lèvres, dans les mains et dans les pieds. On commence alors à le maîtriser : il faut ralentir le rythme, peu à peu. Le but est de le stopper complètement pour ensuite relancer progressivement la circulation en sens inverse.

Manuel ne peut pas encore être affectueux avec moi. Il doit être fidèle aux listes que nous avons élaborées et donc rester distant, dire le strict nécessaire et rentrer tard à la maison certains soirs pendant un mois et demi. Il respecte son rôle avec application mais je le connais et je sais que, secrètement, il va déjà mieux et qu’il meurt d’envie de m’embrasser et de me dire combien je lui manque. Mais il faut agir ainsi pour l’instant ; nous ne pouvons pas courir le risque de nous éloigner ne serait-ce qu’une seconde du scénario.

Le mois suivant, je continue à progresser en respiration consciente. Je sens presque que j’arrive à contenir l’énergie. Weisman dit que je ne suis pas loin du but, qu’il faut juste que je m’efforce un tout petit peu plus. Il augmente ma dose de cachets. Je remarque que mon anxiété commence à diminuer et je mange un peu moins. Respectant le premier point de sa liste, la mère de Manuel fait de son mieux et essaie progressivement — cela est très important et nous lui avons fait remarquer à plusieurs reprises —, progressivement, disais-je, de moins nous appeler et de faire baisser l’anxiété causée en nous parlant tout le temps de Teresita.

Le deuxième est sans doute le mois où se produisent le plus de changements. Mon corps n’est plus aussi enflé et à notre surprise et notre joie à tous les deux, mon ventre commence à diminuer. Ce changement notable met un peu nos parents en alerte. C’est peut-être maintenant qu’il comprennent ou qu’ils pressentent en quoi consiste le traitement. La mère de Manuel, surtout, semble craindre le pire et, bien qu’elle s’efforce de rester à l’écart et de continuer à suivre les instructions de sa liste, je sens sa peur et ses doutes et je crains que cela n’affecte le traitement.

Je dors mieux la nuit et je ne me sens plus aussi déprimée. J’expose à Weisman mes progrès en respiration consciente. Il s’enthousiasme, il semble que je sois tout prêt de parvenir à inverser mon énergie : tellement mais tellement près qu’à peine un cheveu me sépare de l’objectif.

Le troisième mois commence, l’avant-dernier. C’est le mois où le rôle de nos parents est le plus important ; nous sommes désireux de vérifier qu’ils tiennent parole et que tout se passe à la perfection, et ils le font, le font bien, et nous leur en sommes reconnaissants. Un après-midi, la mère de Manuel arrive à la maison et réclame les draps de couleurs qu’elle avait apportés pour Teresita. Peut-être parce qu’elle avait longtemps pensé à ce détail, elle me demande un sac pour ranger le tout. C’est que j’ai tout apporté comme ça — dit-elle —, dans un sac, alors ça repart comme ça — et elle nous fait un clin d’œil. Après, c’est au tour de mes parents. Ils viennent eux aussi chercher leurs cadeaux, ils les réclament un par un : d’abord la cape de bain en nid d’abeille, ensuite les chaussons pur coton, enfin la table à langer lavable avec fermeture Velcro. Je les emballe. Maman demande à caresser une dernière fois mon ventre. Je m’assieds dans le fauteuil, elle s’assied à côté de moi et elle parle d’une voix douce et tendre. Elle caresse le ventre et dit, c’est ma Teresita, comme elle va me manquer Teresita, et moi je ne dis rien mais je sais que, si elle avait pu, si elle n’avait pas dû s’en tenir à sa liste, elle aurait pleuré.


Les journées du dernier mois passent vite. Manuel peut déjà s’approcher un peu plus et, en vérité, sa compagnie me fait du bien. Nous nous plaçons devant le miroir et nous rions. La sensation est tout le contraire de ce que l’on ressent en partant en voyage. Ce n’est pas la joie de partir mais celle de rester. C’est comme si l’on ajoutait un an à la meilleure année de sa vie, dans les mêmes conditions. C’est l’opportunité de poursuivre en continu.

Je suis beaucoup moins enflée. Cela soulage mes activités et me redonne du courage. Je vais à mon dernier rendez-vous avec Weisman.

— Le moment approche, dit-il, et il pousse le flacon de conservation sur le bureau, dans ma direction. Il est glacé et doit être conservé tel quel, c’est pour cela que j’ai apporté mon récipient isotherme, comme Weisman me l’a recommandé. Je dois le placer dans le congélateur dès mon retour. Je le soulève : le liquide est transparent mais épais, comme un flacon de sirop incolore.

Un matin, pendant une séance de respiration consciente, j’arrive à atteindre le dernier niveau : je respire lentement, mon corps sent l’humidité de la terre et l’énergie qui l’enveloppe. Je respire une fois, encore, encore, et là tout se suspend. L’énergie semble se matérialiser autour de moi et je pourrais indiquer le moment précis où, peu à peu, elle se met à circuler en sens inverse. C’est une sensation purifiante, rajeunissante, comme si l’air ou l’eau retournaient tout seuls là où ils avaient auparavant été contenus.

Puis le jour arrive. Il est signalé sur le calendrier du frigo, Manuel l’a entouré d’un cercle rouge quand nous sommes rentrés pour la première fois du cabinet de Weisman. Je ne sais pas quand cela va se produire, je suis angoissée. Manuel est à la maison. Je suis allongée sur le lit. Je l’entends faire les cent pas, inquiet. Je me touche le ventre. C’est un ventre normal, comme celui de n’importe quelle femme, je veux dire que ce n’est pas le ventre d’une femme enceinte. Au contraire, Weisman dit que le traitement a été très intense : je suis un peu anémique et beaucoup plus maigre que lorsque l’histoire de Teresita a commencé.

J’attends toute la matinée et tout l’après-midi dans ma chambre. Je ne veux pas manger, ni sortir, ni parler. Manuel se montre de temps en temps et me demande comment je vais. J’imagine que maman doit être en train d’escalader les murs pour voir quelque chose, mais ils savent qu’ils ne peuvent pas appeler, ni passer me voir.

Maintenant, cela fait un moment que j’ai des nausées. Mon estomac me brûle et bat de plus en plus fort, comme s’il allait exploser. Je dois prévenir Manuel mais c’est en vain que j’essaie de me redresser, je ne m’étais pas rendue compte à quel point ma tête tournait. Je dois prévenir Manuel pour qu’il appelle Weisman. Je parviens à me lever, j’ai des vertiges. Je me laisse tomber par terre et j’attends un instant à genoux. Je pense à la respiration consciente mais ma tête est déjà ailleurs. J’ai peur. Je crains que tout ne se passe pas bien et que l’on fasse du mal à Teresita. Peut-être sait-elle ce qui est en train de se passer, peut-être que tout cela est très mal. Manuel entre dans la chambre et court vers moi.

— Je veux juste laisser ça pour plus tard…, lui dis-je, je ne veux pas que…

Je veux lui dire de me laisser étendue là, que ce n’est pas grave, qu’il courre appeler Weisman, que tout s’est mal passé. Mais je ne peux pas parler. Mon corps tremble, je n’arrive pas à le contrôler. Manuel s’agenouille près de moi, il me prend les mains, me parle mais je n’écoute pas ce qu’il dit. Je sens que je vais vomir. Je me couvre la bouche. Il semble réagir, me laisse seule et court vers la cuisine. Il ne met pas plus de quelques secondes : il revient avec le bocal désinfecté et le récipient en plastique qui dit « Dr. Weisman ». Il déchire le ruban de sûreté du récipient, verse le contenu translucide dans le bocal. J’ai à nouveau envie de vomir mais je ne peux pas, je ne veux pas : pas encore. J’ai un haut-le-cœur, un autre, et un autre, des haut-le-cœur de plus en plus violents qui me coupent le souffle. Pour la première fois, je pense à la possibilité de la mort. J’y pense un instant et je ne peux plus respirer. Manuel me regarde, il ne sait pas quoi faire. Les nausées s’interrompent et quelque chose m’obstrue la gorge. Je ferme la bouche et prends Manuel par le poignet. Je sens alors une toute petite chose, de la taille d’une amande. Je la place sur ma langue, elle est fragile. Je sais ce que je dois faire mais je ne peux pas le faire. C’est une sensation unique que je garderai pendant plusieurs années. Je regarde Manuel qui semble comprendre le temps dont j’ai besoin. Elle nous attendra, me dis-je. Elle sera bien : jusqu’au moment opportun. Alors Manuel approche le bocal de conservation et, enfin, lentement, je la crache.

Traduit par Laure Gauzé

Pasa una semana, un mes, y vamos haciéndonos la idea de que Teresita se adelantará a nuestros planes. Voy a tener que renunciar a la beca de estudios porque dentro de unos meses ya no va a ser fácil seguir. Quizá no por Teresita, sino por pura angustia, no puedo parar de comer y empiezo a engordar. Manuel me alcanza la comida al sillón, a la cama, al jardín. Todo organizado en la bandeja, limpio en la cocina, abastecido en la alacena, como si la culpa, o qué se yo qué cosa, lo obligara a cumplir con lo que espero de él. Pero pierde sus energías y no parece muy feliz: regresa tarde a casa, no me hace compañía, le molesta hablar del tema.

Pasa otro mes. Mamá también se resigna, nos compra algunos regalos y nos los entrega —la conozco bien— con algo de tristeza. Dice:

—Este es un cambiador lavable con cierre de belcro… Estos son escarpines de puro algodón… Esta es la toalla con capucha en piqué… —papá mira las cosas que nos van regalando y asiente.

—Ay, no sé… —digo yo, y no sé si me refiero al regalo o a Teresita.— La verdad es que no sé —le digo más tarde a mi suegra cuando cae con un juego de sabanitas de colores—, no sé —digo ya sin saber qué decir, y abrazo las sábanas y me largo a llorar.

El tercer mes me siento más triste todavía. Cada vez que me levanto me miro al espejo y me quedo así un rato. Mi cara, mis brazos, todo mi cuerpo, y por sobre todo la panza, están cada vez más hinchados. A veces llamo a Manuel y le pido que se pare a mi lado. A él en cambio lo veo más flaco. Además, cada vez me habla menos. Llega del trabajo y se sienta a mirar televisión sosteniéndose la cabeza. No es que ya no me quiera, ni que me quiera menos. Sé que Manuel me adora y sé qué, como yo, no tiene nada en contra de nuestra Teresita, qué va a tener. Pero es que había tanto que hacer antes de su llegada.

A veces mamá pide acariciar la panza. Me siento en el sillón y ella con voz suave y cariñosa le dice cosas a Teresita. A la mamá de Manuel, en cambio, se le da por llamar a cada rato para saber cómo estoy, dónde estoy, qué estoy comiendo, cómo me siento, y todo lo que se le pueda ocurrir preguntar.

Tengo insomnio. Paso las noches despierta, en la cama. Miro el techo con las manos sobre la pequeña Teresita. No puedo pensar en nada más. No puedo entender como en un mundo en el que ocurren cosas que todavía me parecen maravillosas, como alquilar un coche en un país y devolverlo en otro, descongelar del freezer un pescado fresco que murió hace treinta días, o pagar las cuentas sin moverse de casa, no pueda solucionarse un asunto tan trivial como un pequeño cambio en la organización de los hechos. Es que simplemente no me resigno.


Entonces olvido la guía de la obra social y busco otras alternativas. Hablo con obstetras, con curanderos y hasta con un chamán. Alguien me da el número de una comadrona y hablo con ella por teléfono. Pero cada uno a su manera presenta soluciones conformistas o perversas que nada tienen que ver con lo que busco. Me cuesta hacerme a la idea de recibir a Teresita tan temprano, pero tampoco quiero lastimarla. Y entonces doy con el Doctor Weisman.

El consultorio queda en el último piso de un edificio antiguo del centro. No tiene secretaria, ni sala de espera. Sólo un pequeño hall de entrada, y dos habitaciones. Weisman es muy amable, nos hace pasar y nos ofrece café. Durante la conversación se interesa en especial por el tipo de familia que formamos, por nuestros padres, por nuestro matrimonio, por las relaciones particulares entre cada uno de nosotros. Contestamos todo lo que pregunta. Weisman entrecruza los dedos y apoya las manos sobre el escritorio, parece conforme con nuestro perfil. Nos cuenta algunas cosas sobre su trayectoria, el éxito de sus investigaciones y lo que nos puede ofrecer, pero entiende que no necesita convencernos, y pasa a explicarnos el tratamiento. Cada tanto miro a Manuel: escucha con atención, asiente, parece entusiasmado. El plan incluye cambios en la alimentación, en el sueño, ejercicios de respiración, medicamentos. Va a haber que hablar con mamá y papá, y con la madre de Manuel; el papel de ellos también es importante. Anoto todo en mi cuaderno, punto por punto.

—¿Y qué seguridad tenemos con este tratamiento? —pregunto.

—Tenemos lo que necesitamos para que todo salga bien —dice Weisman.

Al día siguiente Manuel se queda en casa. Nos sentamos en la mesa del living, rodeados de grillas y papeles, y empezamos a trabajar. Anotamos lo más fielmente posible cómo se han ido dando las cosas desde el momento en que sospechamos que Teresita se había adelantado. Citamos a nuestros padres y somos claros con ellos: el asunto está decidido, el tratamiento en marcha, y no hay nada que discutir. Papá va a preguntar algo, pero Manuel lo interrumpe:

—Tienen que hacer lo que les decimos —dice. Entiendo lo que siente: tomamos esto en serio y esperamos lo mismo de los demás—, en la hora y al tiempo que corresponda.

Están preocupados y creo que no llegan a entender de qué se trata, pero se comprometen a seguir las instrucciones y cada uno vuelve a su casa con una lista.

Cuando concluyen los primeros diez días las cosas ya están un poco más aceitadas. Tomo mis tres pastillas diarias en horario y respeto cada sesión de “respiración consciente”. La respiración consciente es parte fundamental del tratamiento y es un método de relajación y concentración innovador, descubierto y enseñado por el mismo Weisman. En el jardín, sobre el césped, me centro en el contacto con “el vientre húmedo de la tierra”. Comienzo inhalando una vez y exhalando dos veces. Prolongo los tiempos hasta inspirar durante cinco segundos, y exhalar en ocho. Tras varios días de ejercicio inhalo en diez y exhalo en quince, y entonces paso al segundo nivel de respiración consciente y empiezo a sentir la dirección de mis energías. Weisman dice que eso va a tomarme algo más de tiempo, pero insiste en que el ejercicio está a mi alcance, en que tengo que seguir trabajando. Hay un momento en el que es posible visualizar la velocidad a la que la energía circula en el cuerpo. Se siente como un cosquilleo suave, que comienza por lo general en los labios, en las manos y en los pies. Entonces uno empieza a controlarlo: hay que aminorar el ritmo, lentamente. La meta es detenerlo por completo para, poco a poco, retomar la circulación en sentido contrario.

Manuel no puede ser muy cariñoso conmigo todavía. Tiene que ser fiel a las listas que hicimos y por lo tanto, hasta dentro de un mes y medio, mantenerse alejado, hablar sólo lo necesario y volver tarde a casa algunas noches. Cumple su parte con esmero pero lo conozco, y sé que, secretamente, ya está mejor, y que se muere de ganas de abrazarme y decirme lo mucho que me extraña. Pero así hay que hacer las cosas por ahora; no podemos arriesgarnos a salirnos ni un segundo del guión.

Al mes sigo progresando en la respiración consciente. Ya casi siento que logro detener la energía. Weisman dice que no falta mucho, que apenas hay que esforzarse un poco más. Me aumenta la dosis de las pastillas. Empiezo a notar que la ansiedad disminuye y como un poco menos. Siguiendo el primer punto de su lista, la madre de Manuel hace su mejor esfuerzo y trata de, gradualmente —esto último es importante y se lo subrayamos repetidas veces—, gradualmente, decía, ir haciendo menos llamados a casa y bajar la ansiedad por hablar todo el tiempo sobre Teresita.

El segundo es, quizás, el mes de más cambios. Mi cuerpo ya no está tan hinchado, y para sorpresa y alegría de ambos, la panza empieza a disminuir. Este cambio tan notable alerta un poco a nuestros padres. Quizás es ahora cuando entienden, o intuyen, en qué consiste el tratamiento. La madre de Manuel, sobre todo, parece temer lo peor y, aunque se esfuerza por mantenerse al margen y seguir su lista, siento su miedo y sus dudas y temo que esto afecte el tratamiento.

Duermo mejor a la noche, y ya no me siento tan deprimida. Le cuento a Weisman mis progresos en la respiración consciente. Él se entusiasma, parece que estoy a punto de lograr mi energía inversa: tan pero tan cerca que solo un velo me separa del objetivo.

Empieza el tercer mes, el anteúltimo. Es el mes en el que más protagonismo van a tener nuestros padres; estamos ansiosos por ver que cumplan con su palabra y que todo salga a la perfección, y lo hacen, y lo hacen bien, y estamos agradecidos. La madre de Manuel llega a casa una tarde y reclama las sábanas de colores que había traído para Teresita. Quizá porque había pensado en este detalle durante mucho tiempo, me pide una bolsa para envolver el paquete. Es que así lo traje, dice, con bolsa, así que así se va, y nos guiña un ojo. Después les toca a mis padres. También vienen por sus regalos, los reclaman uno por uno: primero la toalla con capucha en piqué, después los escarpines de puro algodón, por último el cambiador lavable con cierre de belcro. Los envuelvo. Mamá pide acariciar por última vez la panza. Me siento en el sillón, ella se sienta al lado mío, y habla con voz suave y cariñosa. Acaricia la panza y dice, esta es mi Teresita, cómo voy a extrañar a mi Teresita, y yo no digo nada, pero sé que, si hubiera podido, si no hubiera tenido que limitarse a su lista, habría llorado.


Los días del último mes pasan rápido. Manuel ya puede acercarse más y la verdad es que su compañía me hace bien. Nos paramos frente al espejo y nos reímos. La sensación es todo lo contrario a lo que se siente al emprender un viaje. No es la alegría de partir, sino la de quedarse. Es como si al mejor año de tu vida le agregaras un año más, bajo las mismas condiciones. Es la oportunidad de seguir en continuado.

Estoy mucho menos hinchada. Eso alivia mis actividades y me levanta el ánimo. Hago mi última visita a Weisman.

—Se acerca el momento —dice él, y empuja sobre el escritorio, hacia mí, el frasco de conservación. Está helado, y así debe mantenerse, por eso traje la vianda térmica, como Weisman recomendó. Debo guardarlo en la heladera en cuanto llegue. Lo levanto: el agua es transparente pero espesa, como un frasco de almíbar incoloro.

Una mañana, durante una sesión de respiración consciente, logro pasar al último nivel: respiro lentamente, el cuerpo siente la humedad de la tierra y la energía que lo envuelve. Respiro una vez, otra vez, otra vez, y entonces todo se detiene. La energía parece materializarse a mi alrededor y podría precisar el momento exacto en el que, poco a poco, comienza a circular en sentido inverso. Es una sensación purificadora, rejuvenecedora, como si el agua o el aire volviesen por sí mismas al sitio en el que alguna vez estuvieron contenidas.

Entonces llega el día. Está marcado en el almanaque de la heladera, Manuel lo rodeó con un círculo rojo cuando volvimos del consultorio de Weisman por primera vez. No sé cuándo sucederá, estoy preocupada. Manuel está en casa. Estoy recostada en la cama. Lo escucho caminar de un lado a otro, intranquilo. Me toco la panza. Es una panza normal, una panza como la de cualquier mujer, quiero decir que no es una panza de embarazada. Al contrario, Weisman dice que el tratamiento fue muy intenso: estoy un poco anémica, y mucho más flaca que antes de que el asunto de Teresita empezara.

Espero toda la mañana y toda la tarde encerrada en mi cuarto. No quiero comer, ni salir, ni hablar. Manuel se asoma cada tanto y pregunta cómo estoy. Imagino que mamá debe estar trepándose por las paredes, pero saben que no pueden llamar ni pasar a verme.

Ahora hace rato que siento náuseas. El estómago me arde y late cada vez más fuerte, como si fuera a explotar. Tengo que avisarle a Manuel, pero trato de incorporarme y no puedo, no me había dado cuenta de lo mareada que estaba. Tengo que avisarle a Manuel para que llame a Weisman. Logro levantarme, me siento mareada. Me dejo caer al piso y espero un segundo de rodillas. Pienso en la respiración consciente pero mi cabeza ya está en otra cosa. Tengo miedo. Temo que algo pueda salir mal y lastimemos a Teresita. Quizá ella sepa lo que está pasando, quizá todo esto esté muy mal. Manuel entra a la habitación y corre hasta mí.

—Yo sólo quiero dejarlo para más adelante… —le digo— no quiero que…

Quiero decirle que me deje acá tirada, que no importa, que corra a hablar con Weisman, que todo salió mal. Pero no puedo hablar. Me tiembla el cuerpo, no tengo control sobre él. Manuel se arrodilla junto a mí, me toma de las manos, me habla pero no escucho lo que dice. Siento que voy a vomitar. Me tapo la boca. Él parece reaccionar, me deja sola y corre hacia la cocina. No demora más que unos segundos: regresa con el vaso desinfectado y el envase plástico que dice "Dr. Weisman". Rompe la faja de seguridad del envase, vierte el contenido translúcido en el vaso. Otra vez siento ganas de vomitar, pero no puedo, no quiero: no todavía. Tengo una arcada, y otra, y otra, arcadas cada vez más violentas que empiezan a dejarme sin aire. Por primera vez pienso en la posibilidad de la muerte. Pienso en eso un instante y ya no puedo respirar. Manuel me mira, no sabe qué hacer. Las arcadas se interrumpen y algo se me atora en la garganta. Cierro la boca y tomo a Manuel de la muñeca. Entonces siento algo pequeño, del tamaño de una almendra. Lo acomodo sobre la lengua, es frágil. Sé lo que tengo que hacer pero no puedo hacerlo. Es una sensación inconfundible que guardaré hasta dentro de algunos años. Miro a Manuel, que parece aceptar el tiempo que necesito. Ella nos esperará, pienso. Ella estará bien: hasta el momento indicado. Entonces Manuel me acerca el vaso de conservación, y al fin, suavemente, la escupo.

Par Samanta Schweblin

Samanta Schweblin (Buenos Aires, 1978) a suivi le cursus Image et Son de la Universidad de Buenos Aires. En 2001, elle obtient le premier prix du Fondo Nacional de las Artes et le premier prix du Concurso Nacional Haroldo Conti pour son premier livre El núcleo del Disturbio (Planeta, 2002). En 2008, elle obtient le prix Casa de las Américas, pour son recueil de nouvelles Pájaros en la boca, et la bourse FONCA de résidences pour artistes du gouvernement mexicain. Nombre de ses nouvelles ont été traduites en allemand, anglais, italien, français, portugais, suédois et serbe, pour leur publication dans de nombreuses anthologies, revues, et médias culturels.

Laure Gauzé (Pau, 1981) Traductrice diplômée en traduction littéraire à l’Institut Supérieur des Traducteurs et Interprètes de Bruxelles. Elle a traduit en français un extrait du roman El testigo de Juan Villoro pour la revue littéraire Spirale (2006) ainsi que des livres sur l’archéologie et la gastronomie pour les maison d’édition Azabache et Quai Rouge. Elle vit actuellement à Mexico où elle travaille en tant que traductrice et professeur de français.

Illustrations d’Esteban De la Mata. Originaire de Mar del Plata, en 2002 il obtient un diplôme en communication sociale à l’Université nationale de La Plata. Il a travaillé comme journaliste à la radio et à la télévision, et comme attaché de presse dans le domaine politique. Il a aussi été professeur, facteur, barman et ouvrier agricole. Il a vécu dans de nombreux endroits (La Plata, Buenos Aires, Patagonie, Brésil, Espagne) et vit actuellement à Bordeaux.