Partie VIII

MOOLLA saisit l’allusion. Ils improvisent une saynette.

VIRA/MOOLLA (fort)

Chor, saaley ! Manger mes parathas sans payer ? Qui a porté le atta et le ghee pour les parathas, hein ? Dis-moi, qui s’est payé la trotte en char à bœufs depuis Mombasa pour que vous, les coolies, vous sentiez chez vous ? Et c’est comme ça que tu me remercies ? En refusant de payer ? Baap-ka- raaj sumjhya [Tu crois que c’est le royaume de ton père] ? Nikalo – donne 50 paisa – oui, 50 paisa seulement pour les meilleures parathas depuis celles que tu as mangées chez ta mère ! donne 50 paisa ou cette panga transformera tes mains en keema !

Un attroupement s’est formé, profitant du spectacle.

VIRA/MOOLLA

50 paisa à peine, bhaio, et ce kameena [cet avare] refuse de me payer !

LES SPECTATEURS à MEHTA

Paie-le, paie-le,

Saale-ya paie-le !

MEHTA (jouant le jeu)

D’accord, d’accord – maaf kijiey [pardonne-moi] – tiens, voici un anna pour ta paratha !

Les spectateurs entourent VIRA/MOOLLA et bientôt l’inondent de commandes. ISHWAR fend la foule et se plante devant VIRA/MOOLLA, fasciné.

ISHWAR

Vira ?!

Un temps. VIRA regarde fixement ISHWAR. Et refuse de le reconnaître.

VIRA/MOOLLA

Pourquoi restes-tu planté là comme un idiot ? Sors tes sous et mange ma paratha !

ISHWAR

Fou… Je deviens fou… Je vois Vira partout, dans les rails du chemin de fer, dans chaque tente que j’aperçois, dans chaque homme que je rencontre…
Vira !

VIRA/MOOLLA

Tu cherches à me ridiculiser ? Les derniers qui ont essayé, je leur ai coupé la langue avec ma panga pour en faire de la chair à pâté !

ISHWAR

Maaf kurrin munDeya [pardonne-moi, petit] – mais tu – es le portrait craché de ma Vira, la femme de mon ami à –

VIRA/MOOLLA

Alors où est-il, cet ami ? Pourquoi n’est-il pas avec toi ? Tout le monde doit pouvoir goûter de mes parathas !? Ja, yaar – vas le chercher, vas le chercher – pourquoi manger mes parathas tout seul ?! S’il est ton ami, qu’il se remplisse le ventre lui aussi ! – Tiens, prends cette paratha – bakchich…

ISHWAR prend la paratha et fait demi-tour, déconcerté. Lorsqu’il se retourne, VIRA/MOOLLA est partie, de même que la foule. ISHWAR pousse un cri.

ISHWAR

Qu’est-ce que c’est que cette Afrique ? (s’effondre.)

PATTERSON entre à grand pas. Contemple le champ couvert de tentes.

PATTERSON

Les rats courent le long du sol marécageux, la peste se propage de tente en tente parmi les coolies. Les boutiques et les logements des Indiens doivent être faits en dur pour endiguer l’épidémie. Brûlez le camp !

Raye de sa canne le champ couvert de tentes. Des flammes jaillissent. Nairobi est complètement brûlé.

PATTERSON

Vous avez un mois pour ériger sur votre terrain des bâtiments corrects et clôturés. Si vous n’y arrivez pas, le gouvernement de Sa Majesté confisquera la terre.

PATTERSON sort à grands pas.

ISHWAR

Sur la balançoire, dans le village de Phulean, Vira et moi chantions – saunld dha mahina, pingha, Teyri yaan tey meyrian – vey biba, Teyri yaan tey meyrian –

MEHTA

Saunld dha mahina nai hai, bhai – tu n’as pas entendu ce Patterson de malheur ? On va devoir mettre les bouchées doubles maintenant si on veut voir une nouvelle ville naître sous nos yeux !

MEHTA s’en va.

ISHWAR (hurlant désespérément)

Naître, naître, naître !

Les équipes commencent à escalader.

LE CHŒUR

Sunno, sunno ai dunniya vaalo [écoute, ô peuple du monde], /

L’équipe qui vainquit

La vallée du Rift / - cette vallée

Où Dieu creusa la terre

De l’Arabie à l’Afrique. / Cette

Vallée entourée par les Montagnes

De la Lune, / se dressant au milieu

Des nuages / et dont les pics sont fruits

Et vin pour les dieux chaque jour. /

Dos courbés, / mains clouées à

Cinq cents livres de rails d’acier, /

Nous grimpons pour embrasser les étoiles - /

C’est ainsi que Dieu fit le monde, yaaro - /

Il s’érafla les ongles à soulever des pierres /

Il se voûta le dos à porter des fardeaux /

Il maudit son esprit chimérique !

FATEH

Baise chaque pas que nous faisons, Allauddin – nous suivons les traces mêmes de Dieu ! Ici est un Pendjab plus grand que le Pendjab ! Ici je pourrai voir le blé que j’aurai semé s’élever aussi haut que les nuages !

ALLAUDDIN

Et tu auras besoin de viande, pour te donner des forces ! Ici j’ouvrirai ma boucherie halal – de la viande fraîche tous les jours – chevreuil et chèvre – tu as déjà mangé de la chèvre aux épinards, Fateh ? Quand nous réclamerons nos cinq acres, ici, je cuisinerai pour toi ce plat qui te fera venir les larmes aux yeux !

AMAR

Tu m’apprendras à dépecer les animaux, Allauddin-baba ?

ALLAUDDIN

Oui, oui, oui, Amar – ici, tu peux me demander n’importe quoi !

MEHTA (à Vira/Moolla)

Moolla, de ce froid nous ferons de l’or –nous enroberons de glace un bâtonnet et y mettrons du jus de fruit – le sorbet nous apporterons à ce pays ! De la sueur divine nous ferons du miel pour les gorges assoiffées –

VIRA/MOOLLA

Et gagnerons plus d’argent…

MEHTA

Telle est la générosité de Dieu ! Ici, on n’a pas de difficulté à voir Lakshmi flottant sur ses nuages. J’ouvrirai un autre duka ici. Tu seras bwana, boita. Tu donneras au kaley des parathas bien chaudes d’une main et des sorbets glacés de l’autre !... Chaque fleur sera un duka, boita ! Tes échoppes s’égrèneront depuis cet escarpement jusqu’à la Mer d’Amara comme les perles d’un collier.

VIRA/MOOLLA

Partout où passera la voie ferrée, Mehta-ji, ton nom sera colporté.

MEHTA

Moolla… tu devrais songer à te marier. Tu as besoin d’une femme, d’une compagne pour ancrer ta maison. Et ensuite d’enfants, pour t’accroître.

VIRA/MOOLLA

J’ai – quelqu’un en vue.

MEHTA

J’en étais sûr ! Quand tu seras prêt, tu me le dis. C’est moi qui te marierai ! Voilà ce qu’il nous faut ici maintenant, semer des graines qui produiront des biens abondants.

VIRA/MOOLLA

Mehta-ji, tant que durera la construction de ce chemin de fer, je pourvoirai aux besoins des équipes devant moi – nous sommes mariés, elles et moi, depuis le temps que nous parcourons le feu de ce pays, moi toujours un pas derrière. Un jour bientôt, nous marcherons ensemble, le lien du mariage noué autour de nos cous !

MEHTA

Zaruur [bien sûr] !

MEHTA fait demi-tour à son char à bœufs et s’en va.

MEHTA

Et que nous puissions jouir d’un crédit qui s’étende de mon Nairobi à tes boutiques comme une longue chaîne, boita ! (il s’en va)

VIRA/MOOLLA

Quand je rattraperai Fateh, est-ce qu’il m’achètera un sorbet ?

ISHWAR se met à rire tout haut.

ISHWAR

Romps-les – romps les promesses – Fateh – tu te rappelles tes pas quand tu emmenais son doli chez toi ! Les promesses volent au vent froid sur ces montagnes ! – Chaud, brûlant dans ce froid j’ai chaud – donne-moi une couverture…

PATTERSON apparaît. Contemple le paysage.

PATTERSON

Mile 362, escarpement oriental de la vallée du Rift. 9000 pieds au-dessus du niveau de la mer. Un degré au sud de l’Équateur, le sol rouge donne des champs verts et luxuriants… Ce remarquable don de Dieu a besoin d’une agriculture adéquate. Pour donner un sens et un but aux rails d’acier qu’on a posés… Ici prospéreront des fermes de dix mille acres ! Café, thé, bœuf et lait pour satisfaire l’estomac des gens quand ils rentrent chez eux ! Le train transportera les richesses de ces blanches régions montagneuses jusqu’aux foyers des Anglaises et des Anglais !

LE CHŒUR

Et la promesse ? /

La promesse de cinq acres pour les coolies ?

PATTERSON

Morte comme feuilles que vent emporte.

LE CHŒUR

Prends garde, un jour ce sera toi que ce vent emportera.

PATTERSON

À chacun son destin. Allez, la voie ferrée doit continuer – Cette tête de ligne ne finira que lorsque nous atteindrons le lac Victoria.

LE CHŒUR

La mer d’Amara !

PATTERSON

Appelez ça comme vous voulez, ce sera toujours le lac Victoria.

Une vol de flamants passe dans un battement d’ailes.

LE CHŒUR

Nakuru / - mile 447 ! /

Des flamants surgissent à tire-d’aile, / teintant

D’un rose chatoyant le lac au pied de

La vallée du Rift, / leur couleur de soleil

Couchant comme un souvenir de ces temps

Lointains / où hommes et femmes

Sortirent des cavernes en rampant pour laisser leurs

Premières empreintes sur la terre rouge.

FATEH et MIJIZA près du lac.

MIJIZA

Tu es un enfant d’homme, né de l’esprit d’un lion, Fateh.

FATEH

Pourquoi ces oiseaux se posent-ils ici, sur ce lac?

MIJIZA

Pour faire leurs petits.

FATEH

Quand la voie ferrée sera terminée, Mijiza, tu pourras fonder un nouveau foyer n’importe où sur cette terre.

MIJIZA

L’esprit de la terre mourra-t-il quand nous, Massaï, n’aurons plus la liberté d’aller et venir à notre guise avec notre bétail ?

FATEH

Qui vous en empêchera ?

MIJIZA

Les Mzungu [Blancs], ils captureront l’esprit.

FATEH

Uniquement la terre.

MIJIZA

Alors, nous ne devrons pas bouger…

FATEH

Quand ta charrue sera cassée, je viendrai l’arranger. Si ta panga est rouillée, je viendrai l’aiguiser.

MIJIZA (rit)

Le Kala Singha qui viendra faire peur aux enfants avec sa longue barbe et ses longs cheveux, ses outils à la main !!!

FATEH

Ces cinq dernières années j’ai marché sur des rivets, dormi sur des rails, porté des traverses, placé des sièges à coups de marteau – les saisons de la terre, je les ai oubliées, les outils du rail sont mes amis à présent.

La Tzigane apparaît.

TZIGANE

Murkha – vois-tu à présent la ligne dans ta main ?!

FATEH (à la Tzigane)

Quelque chose est en train de prendre forme…

MIJIZA

Quoi ? Fateh ? Qu’est-ce qu’elle te dit, ta main ?

TZIGANE

Pour connaître ton destin, tu dois être aussi patient que lorsque tu attendais pour voir s’épanouir le fruit de tes semailles.

FATEH

Vira…

TZIGANE

Prendre en main son destin est douloureux – moi par exemple – manney joa, murkha ! J’ai dansé des déserts du Rajasthan à l’Andalousie – de l’Inde à l’Arabie en passant par l’Espagne, mes pieds ont été ma destinée, mon seul amant, mon ami. Ne réclame pas Vira en pleurant – elle trace ses propres empreintes sur la terre rouge !

FATEH

Et si je ne peux pas – ou si tel n’était pas mon destin ?

La Tzigane rit et disparaît.

MIJIZA

Fateh – Fateh – à qui parles-tu, Kala Singha ?

FATEH

Au flamant rose. Je dois partir. Quand tu viendras au camp, je te laisserai à manger.

FATEH s’en va.

MIJIZA

Cet homme venant de l’autre côté de l’océan, je n’arrive pas à voir sa poussière. C’est une autre qui siège dans son cœur, une autre à qui il parle alors que c’est à moi qu’il laisse à manger, une autre qui est venue une fois dans son camp avec sa calebasse brisée… Okang, mon bien aimé, pourquoi as-tu lancé ta sagaie contre cette brute de Mzungu [Blanc] ? En lançant cette lance, tu as quitté mon lit, le corps percé d’une balle. Tu m’as laissée, Okang, seule avec le flamant… et un homme qui me donne à manger mais…

Traduit par Elishéva Zonabend Marciano

MOOLLA takes the hint. The enact a little “act”.

VIRA/MOOLLA aloud

Chor, saaley! Eat my paraunThas and not pay? Who brought the atta and the ghee for the paraunThas, heh? Tell me, who drove a bullock cart all the way from Mombasa so you coolies will feel at home? And this is how you will Nikalo – hand over 50 paisa – yes, 50 paisa only bhaio, for the best paraunThas since you last tasted your mother’s cooking! - hand over 50 paisey or I’ll use this panga to make keema of your hands!

A crowd has gathered, enjoying the spectacle.

VIRA/MOOLLA

Only 50 paisey, bhaio, and this kameena [miser] doesn’t want to pay me!

CROWD

Pay him, pay him,

Saaleya pay him!

MEHTA making a show of it

All right, all right – maaf kijiey [forgive me] – here, here is one anna for your paraunTha!

The crowd gathers round VIRA/MOOLLA and soon inundates her with orders. ISHWAR steps through the crowd and stands entranced before VIRA/MOOLLA;

ISHWAR

Vira?!

A beat. VIRA stares at ISHWAR; And refuses to acknowledge him.

VIRA/MOOLLA

Why’re you standing there gawping? Take out your money and eat my paraunTha!

ISHWAR

Mad… I’m going mad… Vira stares in my face in every line of track, every tent, every man… Vira!

VIRA/MOOLLA

Trying to make fun of me? Last man who tried, I cut their tongues off whith my panga and made achaar of them!

ISHWAR

Maaf kurrin munDeya [forgive me, boy] – but you – just like my Vira, my friend’s wife in

VIRA/MOOLLA

So where is he, this friend of yours? Why is he not with you so more can eat my parunThas!? Ja, yaar – bring him, bring him – why taste my parunThas alone?! If he’s your friend, let him fill his belly too! – Here, take this paraunTha – backsheesh…

ISHWAR takes the paraunTha and turns, bewildered. When he turns round again, VIRA/MOOLLA is gone, as are the crowd. ISHWAR cries out

ISHWAR

What is this Africa? Breakes down.

PATTERSON strides in. Surveys the tented field.

PATTERSON

Rats scurry along the swampy ground, plague skips from tent to tent amidst the coolies. Constructions of Indian shops and dwellings must be more pukka to keep infestation at bay. Burn the camp!

Draws his stick across the tented field. Flames spring up – Nairobi is burnt to the ground.

PATTERSON

You have one month to erect a proper, fenced dwelling on your plot. If you cannot do this, Her Majesty’s government will confiscate the land.

PATTERSON strides off.

ISHWAR

On the swing in Phulen village, Vira and I would sing – saunld dha mahina, pingha, Teyri yaan tey meyrian – vey biba, Teyri yaan tey meyrian –

MEHTA

Saunld dha mahina nai hai, bhai – didn’t you hear that Patterson? Time now to do even more hard work if a new city is to rise before our eyes!

MEHTA leaves.

ISHWAR shouting desperately

Rise, rise, rise!

The gangs begin to scale up the escarpment.

CHORUS

Sunno, sunno ai dunniya vaalo [listen, o people of the world], /

to the gang that conquered

the Rift Valley/ - that Valley

where God scooped the earth

from Arabia to Africa. / That

valley ringed by the Mountains

of the Moon, / rising through

clouds, / whose peaks are fruit

and wine for the gods each day. /

Backs bent, / hands frozen to

five hundred pound rails of

steel, / we climb to kiss the stars - /

this is how God made the world, yaaro - /

He scarped his nails heaving stones /

He bent his back bearing burdens /

He cursed his mind dreaming dreams!

FATEH

Kiss every step we take, Allauddin – we are following in God’s own footsteps! Here is a Punjab greater that Punjab! Here I can see the corn I sow rise high to touch the coulds!

ALLAUDDIN

And you will need meat, to give you strength! Here I will open my halal meat shop – fresh meat every day – deer and goat – ever had saag-goat, Fateh? When we claim our five acres here, I will cook for you that dish which brings tears of thanks in your eyes!

AMAR

Will you teach me to skin animals, Allauddin-baba?

ALLAUDDIN

Yes, yes, yes, Amar – here, you can ask anything from me!

MEHTA to Vira/Moolla

Moolla, we’ll turn this cold to gold – gather ice around a stick and put sherbet in it – ice-cream we’ll bring to this country! The sweat off God’s back we’ll turn to honey for parched throast –

VIRA/MOOLLA

And make more money…

MEHTA

This is God’s bounty! Here Lakshmi can easily be seen, floating on her clouds. I will open another duka here. You will be bwana, boita. Give the kaley hot paraunThey with one hand and cold ice-cream with the other! ... Each flower a duka, boita! Make a necklace of shops from this escarpment to the Sea of Amara.

VIRA/MOOLLA

Wherever the railway leads, Mehta-ji, your name will be sprinkled.

MEHTA

Moolla… you should think of getting married. You need a wife, a companion to anchor your home. And then children, to expand.

VIRA/MOOLLA

I have - someone in mind.

MEHTA

I knew it! When you are ready, you tell me. I will make your wedding! That is what we need here now, sow seeds that will produce healthy goods.

VIRA/MOOLLA

Mehtaji, as long as this rail building lasts, I will service the gangs ahead of me – we are married, they and I, going round and round the fire of this land, me always a step behind. One day soon, we will walk together, the wedding knot tied round our necks!

MEHTA

Zaruur [of course]!

MEHTA turns his bullock-cart around and departs.

MEHTA

And may a long chain of credit bind my Nairobi with your shops, boita! And exits.

VIRA/MOOLLA

When I catch up with Fateh, will he buy an ice-sherbet from my hands?

ISHWAR begins to laugh out aloud.

ISHWAR

Break them – break the promises – Fateh-ya remember your footsteps taking her doli home! – Promises blow in the cold wind on these mountains! – Hot, burning in this cold I am hot – give me a blanket…

PATTERSON appears. Gazing at the landscape.

PATTERSON

Mile 362, eastern escarpment of the rift valley. 9000 feet above sea level. One degree south of the Equator, the red soil yields lush green fields… This remarkable bounty of God needs proper husbandry. To give meaning and purpose to the steel tracks laid… Here will flourish ten thousand-acre farms! Coffee, tea, beef and milk to satisfy the stomachs of folks back home! The train will carry the bounty of these white highlands into the homes of English men and women!

CHORUS

And the promise? /

The promise of five acres for the coolies?

PATTERSON

Dry as the leaves blown by the wind.

CHORUS

Beware the same wind blowing over you, one day.

PATTERSON

We’ll take our chance with destiny. Come now, the track must go on – this railhead ends only when we reach Lake Victoria.

CHORUS

The Sea of Amara!

PATTERSON

Call it what you please, it remains Lake Victoria.

A flock of flamingo flap past.

CHORUS

Nakuru / - mile 447! /

Flamingoes race, / shimmering

pink the lake at the foot of

the Rift Valley, / their sunset

colour a reminder of those times

long, long ago, / when men and women

crawled out of caves to leave their

first footprints on the red earth.

FATEH and MIJIZA by the lake.

MIJIZA

You are a man-child, born of a lion’s spirit, Fateh.

FATEH

Why do these birds come here, to this lake?

MIJIZA

To make their young.

FATEH

When this railway finishes, Mijiza, you can make a new home anywhere on this land.

MIJIZA

When we Masai can no longer roam with our cattle, will the spirit in the land die?

FATEH

Why not roam?

MIJIZA

The mzungu [Europeans], they will capture the spirit.

FATEH

Only the land.

MIJIZA

Then we will have to stand still…

FATEH

When your plough is broken, I will come and fix it. If your panga is rusty, I will sharpen it.

MIJIZA laughing

The Kala Singha who will come to frighten the children with his long beard and his long hair, carrying his tools!!!

FATEH

I have walked on rivets, slept on rails, carried sleepers, pounded the chairs in place these past five years – the seasons of the land I have forgotten, the tools of the rail are now my friends.

The gypsy appears.

GYPSY

Murkha – can you see the line in your hand now?!

FATEH to Gypsy

Something is taking shape…

MIJIZA

What, Fateh? What does your hand tell you?

GYPSY

To know your destiny, you have to be patient as when you waited to see the crops bloom from your seedlings.

FATEH

Vira…

GYPSY

Seizing destiny is painful – look at me – manney joa, murkha! I have danced from the deserts of Rajasthan to Andalucia – from India to Arabia and Spain, my feet have been my destiny, my only lover, my friend. Do not cry for Vira – she makes her own footprint on the red earth!

FATEH

And what if I can’t - or was not meant to?

GYPSY laughs and disappears.

MIJIZA

Fateh – Fateh – who are you talking to, Kala Singha?

FATEH

The flamingo. I must go. When you come to camp, I will leave food for you.

FATEH goes.

MIJIZA

This man from across the water, I cannot see his dust. Another sits in his heart, with whom he talks, leaving food for me, who came once to his camp with her broken gourd… Okang, beloved man of mine, why did you hurl your spear at this beast of the mzungu? With the flight of that spear, your body left my bed, pierced by a bullet. You have left me, Okang, only with the flamingo… and a man who gives me food but…

Par Jatinder VERMA

CONTEXTE HISTORIQUE

En 1886, les puissances européennes se réunissent à Berlin pour se partager l’Afrique. La Grande Bretagne s’octroie le Kenya et l’Ouganda, l’Allemagne la Tanzanie.
En 1895 aux Indes, famine et peste dévastent le Pendjab et le Goudjerate.
En 1896 débute la construction du chemin de fer d’Afrique-Orientale britannique, utilisant une main d’œuvre indienne, les « coolies ». Attirés par la perspective d’un salaire mensuel et la promesse de 5 hectares de terre à la fin des travaux, ils sont des milliers à s’engager. La ligne fera finalement 1 000 kilomètres de long et, sur les
30 000 ouvriers indiens, un dixième mourra durant les travaux.
Genèse retrace, à partir de quelques personnages, l’histoire de l’immigration de ces
30 000 indiens qui, fuyant la famine et la pauvreté, ont quitté leur pays pour l’Afrique à la fin du dix-neuvième siècle après avoir été recrutés par les colons britanniques en vue de la construction du chemin de fer devant relier la côte est de l’Afrique au Lac Victoria.

RESUME

Quand Fateh, jeune indien du Pendjab, quitte l’Inde pour aller travailler en Afrique, il laisse derrière lui sa femme Vira et son ami Ishwar qui part à l’armée pour pouvoir nourrir les siens. Comme ses compagnons de voyage, Allaudin le boucher musulman, Mehta, marchand opportuniste du Goudjerate, Amar, enfant du Pendjab vendu par ses parents à un agent recruteur, et le Sahid, un « saint homme » originaire du Pendjab, Fateh part avec l’espoir d’une vie nouvelle, une vie meilleure. Le bateau les emporte avec leurs rêves mais aussi leurs interrogations : « Y a-t-il des villes en Afrique ? » ; « Mange-t-on halal en Afrique ? ».
Arrivés sur le continent africain, ils se voient attribuer un numéro. Commence alors pour eux l’enfer de la construction du chemin de fer avec la peste, la mouche tsé-tsé, la chaleur, les moustiques, la malaria, les vers qui creusent des trous dans les pieds, mais la promesse des 15 roupies mensuelles et des 5 hectares de terre une fois le travail terminé leur donne la force et le courage de continuer.
Cependant, en Inde, Ishwar, pris en flagrant délit en train de passer ses rations à sa famille, est renvoyé de l’armée après avoir été condamné à dix coups de fouets. Il décide alors de partir en Afrique à la recherche de Fateh.
Peu après Vira, à son tour, part à la recherche de son mari, déguisée en homme.
Tandis que les coolies progressent en direction du lac Victoria, en butte à de nouveaux obstacles - ils sont attaqués par des lions puis par des tribus Massaï dans la région de Nairobi - Ishwar et Vira poursuivent leur destin : Ishwar rencontrera la mort sur son chemin et Vira finira par retrouver son mari.
Fateh et Vira réunis élèveront ensemble l’enfant nouveau-né d’une femme Massaï qui s’était attachée à Fateh après la disparition de son mari tué par les Britanniques, morte étranglée par Ishwar devenu fou.

PHOTOGRAPHIES : Agnès Varraine Leca.
Née en 1984. Voyage et photographie. Photographie et voyage.
Reportage "L’Inde, Humanité intouchable" en 2005, récompensé au Grand Prix Paris Match du Photoreportage Etudiant.
Expositions d’Octobre à Décembre 2005 aux "Quatre Jeudis" & "Le Petit Chicago", Canada.
Reportage "September 11th, five years later" pour Nazca Pictures, agence internationale de photojournalisme, Mars 2006, New York.
Reportage "100th anniversary of New York City’s taxis", Mai 2007, New York.
Commandes photographiques pour la SAGEP (Eaux de Paris), de Mars à Octobre 2007.

http://www.flickr.com/photos/mydria...
http://www.agnesvarraineleca.com
http://www.nazcapictures.com/featur...