Ich bin ein Deutscher

Si l’on cherchait un jour un nom pour notre siècle, on l’appellerait probablement le siècle des réfugiés et des prisonniers, et si l’on entreprenait d’évaluer le nombre de réfugiés et de prisonniers – à l’échelle internationale, cela s’entend – on en arriverait à un chiffre d’êtres humains avec lesquels on aurait pu peupler des continents entiers. Vraiment un siècle des records. Au cours des siècles passés on tombait, lorsqu’on essayait d’évaluer le nombre d’hommes touchés par les batailles, les conquêtes et les expulsions, sur des chiffres correspondant à la population d’une ville ou d’une région d’étendue moyenne : un village anéanti, une ville détruite s’installaient dans les mythes et circulaient de conte en conte. Dans notre siècle béni, tout de suite, c’est de millions dont il s’agit : soixante millions de victimes de la seconde guerre mondiale pour l’Europe seule, six millions de Juifs européens assassinés, on évalue le nombre de victimes de Staline à quarante millions pour la seule Union Soviétique, et lorsque j’évoque de tels chiffres je dois frémir d’emblée à la venue de celui qui sait mieux que moi, ou croit mieux savoir, et qui me contredit en constatant : non, ça n’a été que quatre, que cinquante, que trente-cinq millions – ou à la venue d’un autre, m’énumérant qu’il s’agissait de plus ; soixante-dix, sept, quarante-cinq millions.

Ainsi s’exprime l’esprit de notre siècle : dans de terribles débats autour de chiffres ronds ; derrière tous ces chiffres arrondis l’individu disparaît toujours davantage jusqu’à devenir invisible dans le fourré des statistiques rivales. Lorsque je lis que 160 000 fonctionnaires de police ont été déployés à Tokyo pour la sécurité du Président américain – cela à l’occasion d’une visite à laquelle on accorda presque exclusivement une signification officielle –, que plus d’un million de personnes ont manifesté pour la même occasion et que trois millions ont fait grève ; qu’en somme, à l’occasion de cette visite symbolique, plus de gens n’ont été mobilisés qu’Israël n’a d’habitants, eh ! bien, toute forme de fiction ne tourne-t-elle pas là, au vu de la réalité – et ça serait dans le film d’épouvante le plus onéreux –, à la farce grotesque ?

Sommes-nous encore à même d’appréhender les grands chiffres par lesquels les hommes sont recensés ? Et, de surcroît, n’y a-t-il pas là quelque chose d’affreusement nouveau : une rivalité internationale qui s’exprime dans une concurrence insensée, qui dit alors : non, non, nous avons eu le plus de morts, plus que vous, nous avons plus de réfugiés, plus de prisonniers que vous. Comment viendrons-nous à bout de cette hideuse espèce de comptabilité moderne des victimes, où les morts deviennent du capital ? Et lorsqu’en outre vient s’y ajouter une interprétation idéologique ou à visée philosophique du monde qui se fait fort de sous-diviser les morts, les réfugiés, les prisonniers en personnes concernées à juste ou injuste titre, tout en parlant de « mesures nécessaires », de « corrections et victimes inévitables », alors les cimetières, visibles et invisibles, deviennent presque des bourses où la mort et l’expulsion sont négociées.

Que j’affranchisse les réfugiés et les prisonniers de l’accoutrement idéologique dans lequel ils deviennent à la fois objets de spéculation et réserve démagogique dans des camps, que je cherche un mot pour la similitude internationale de leur état, alors aucun meilleur mot ne me vient à l’esprit que le mot allemand « Elend » [1], un ancêtre lointain du mot « Ausland» [2] , non pas à comprendre dans le sens touristique, non pas dans le sens de « vivre à l’étranger », d’« aller à l’étranger », mais dans le sens de « dans l’inconnu », « l’autre », « être un barbare » dont la misère est négociée dans une quelconque bourse d’intérêts internationaux.

Cependant il y a une tradition historique de l’esprit qui interprète sur le plan métaphysique ce fait d’être barbare : ne sommes-nous pas tous barbares sur cette terre ? Barbare dans notre propres pays, dans notre propre famille, et n’y a-t-il pas aussi des moments où la propre main d’un individu lui devient aussi barbare que son propre appartement ? Et, après tout, l’histoire de l’humanité ne commence-t-elle pas par l’expulsion – du Paradis – et cette mise au ban n’est-elle pas notre état permanent, fait à notre mesure et dont nous ayons l’octroi ?

Je ne crois pas que seuls les poètes, les penseurs et les théologiens le ressentent ainsi – ils sont juste plus heureux que les autres parce qu’ils peuvent prêter des mots à leur éloignement. Je ne veux ni nier ni renier cette dimension métaphysique, et tout aussi dialectique que poétique, de la mise au ban. Je me demande juste si nous, qui nous nommons auteurs et intellectuels, devons encore prendre part à ces deux jeux, à l’un, le jeu de la bourse, par lequel on essaye de métamorphoser la misère en capital politique, et à l’autre, le jeu métaphysique – dialectique – poétique ?

Je n’ai pas de réponse à cette question, je me contente de la poser. Et je suppose par là qu’il nous est possible – pris entre ces deux jeux – de devenir non seulement réfugiés et apatrides de notre peuple, mais qu’il nous est possible aussi de l’être au sein même de notre peuple et de son organisation étatique. Je cite le poète russe Joseph Brodsky, un exilé : « La langue est quelque chose de bien plus vieux et inéluctable que l’État. J’appartiens à la langue russe. Ce qui a trait à l’État est, selon moi, la mesure de l’amour patriotique d’un écrivain, non le serment fait du haut d’un pinacle, mais l’art et la manière dont il écrit dans la langue de ceux parmi lesquels il vit. »

Lorsque nous parlons ici, à Jérusalem, d’« héritage culturel et de la force créatrice de la littérature de notre temps », cette citation m’a presque l’air d’un slogan. Je pourrais ainsi m’imaginer que le premier État juif, Israël, dans les deux mille ans d’histoire de l’expulsion du peuple juif, apporte, en tant que nouvel élément dans l’héritage culturel, une nouvelle dimension à la littérature juive, sans doute aussi des problèmes que je ne peux juger, mais pressentir. Ce ne fut certainement pas un hasard que le centre PEN israélien ait eu l’idée de faire de la tradition et de la littérature au présent le thème d’un congrès et, précisément, ce congrès a toute sa place ici. Il y a de nouveau un mot allemand dont j’ignore s’il est traduisible : c’est le mot « bodenlos » [3] . Le peuple juif s’est retrouvé sans terre suite à son expatriation, mais sans langue, jamais, et ce qui a assuré sa cohésion et fixé sa culture fut avant tout la transmission des textes, de sorte qu’il fut dans sa langue, toujours à la maison.

Et il y a là un atroce postulat : que celui qui connaît l’expulsion et la peur de celle-là soit pris dans la cruelle obligation d’expulser les autres ; à la recherche d’une nouvelle patrie il contraint les autres à un état qu’il vient de quitter. Le mot « Völkerwanderung » [4] sonne éminemment sympathique, tant « Wandern » [5] et « Wanderung » [6] sont des mots, des paroles pacifiques. En vérité, la randonnée des peuples a toujours été une expulsion des peuples, elle ne s’est jamais faite sans violence ; ici on a déporté, là on a transporté, ailleurs on a laissé derrière soi ; les fluctuations climatiques, géologiques ou politiques en ont toujours été la cause – comme ce rêve des peuples qui voulaient quitter la nuit et le brouillard du Nord pour le soleil du Sud.

Et qu’ont emporté avec eux les exilés, qui en contraignaient d’autres à l’exil ? Leur Dieu, leurs divinités, leurs idoles – et leur langue. La langue est le bagage le plus léger – et une lourde charge lorsque l’on va chez le barbare et, la plupart du temps, on ne peut apporter que ce qu’on a dans la tête et dans le cœur : les mythes et les contes, les souvenirs, les siens et ceux des autres avec lesquels on a la langue en commun. Ce n’est certes pas un hasard que chaque oppression commence par l’oppression de la langue – et avec elle l’oppression de la littérature, si l’on n’entend pas exclusivement par littérature ce qui est écrit. Il y a suffisamment d’exemples : le peuple irlandais, le peuple juif, le polonais ; et ces peuples pauvres comme les susnommés, qui ont dû et doivent souffrir en permanence sous l’oppression, ou comme le peuple juif, continuellement le bourdon en main, sur le seuil de leur maison, ces peuples qui devaient vivre dans la peur du pogrom ou de l’expulsion ne se sont maintenus que dans leur langue.

Nous, les Allemands – jamais non plus un peuple riche, bien pour la première fois de notre histoire sur le seuil d’un certain bien être, ce qui nous est d’ailleurs aussi problématique qu’ambigu – nous n’avons rendu les pleins honneurs à notre langue que très tard dans notre histoire, nous devons la possession définitive de notre grande et belle langue à la traduction de la bible de Martin Luther et nous ne sommes pas l’unique peuple européen auquel l’immensité de la Bible, au sens le plus strict du mot, rendit accessible sa propre langue et la libéra de l’oppression d’un latin aride.

Il y a peu, je découvris le mépris des Allemands face à cela dans le dialecte de ma terre d’origine, dans le mot « verdötscht » [7] , qui signifie autant qu’idiot, stupide ou, pour l’exprimer en yiddish, qui a à peu près la signification de « meschugge » [8] . Tard aussi, peut-être même trop tard, nous sommes devenus, nous les Allemands, nationalistes [9] – plus profondément et plus épouvantablement nous l’avons été, et, comme je le pense, plus profondément nous en avons été guéris.

Et si maintenant je dis quelque chose en tant qu’auteur sur le thème du congrès, je ne peux que naturellement le dire en tant que personne, et, en tant que telle, de manière inévitablement personnelle. J’en suis amené à parler du matériau dans lequel j’essaye de m’exprimer – et pas seulement en tant que personne. Songeons donc un instant à l’état du monde, de l’Europe, de l’Allemagne en 1945 ; à ce moment de l’histoire au cours duquel la doctrine du sang et du sol tartinée par les nazis s’était concrétisée d’une façon monstrueuse dans son retournement : le sol de peuples entiers détruit, le sang de millions de personnes versé – et presque la moitié de l’Europe qui se composait de displaced persons [10] .

Nos pères – je dois ici en exclure mon propre père qui déménageait volontiers de bon gré – dans leur sédentarité naïve nous avaient transmis le dicton : trois déménagements valent une banqueroute. Ce « déménagement » était alors devenu pour d’innombrables personnes un style de vie permanent, qui vivant dans les camps, qui dans les salles d’attente, dans les foyers, dans les villes détruites – nous étions tous des déplacés – et pas seulement physiquement. Je me souviens de longues discussions sur la question de savoir si l’on devait élever des enfants dans une grande ville en ruines ou s’il était préférable de déménager avec eux à la campagne : le spectacle d’une destruction totale, dans une ville détruite, là où la vraie existence n’était qu’à peine maintenue, ne leur aurait-il pas porté préjudice ? La question : ville détruite ou village resté indemne était une question sérieuse là où l’on cherchait un peu de terre à se mettre sous les pieds – ainsi qu’une patrie.

Nous nous sommes résolus à nous installer dans la ville de Cologne, presque totalement détruite, dans laquelle quelques signes reconnaissables de « l’héritage culturel » subsistaient. Nos enfants ont donc grandi au milieu des ruines et – c’est la question que je me pose aujourd’hui – les ruines sont-elles devenues leur héritage culturel ? Il m’est apparu seulement beaucoup plus tard que les ruines étaient des terrains de jeux idéaux, quand bien même partiellement dangereux, parce que l’on pouvait y jouer à la fois à reconstruire, et à détruire : il y avait après tout des pierres, des restes de murs, suffisamment de poutres métalliques, puis après quelques années des fleurs et des arbres poussèrent sur les ruines, et n’était-ce pas le moindre droit d’une nouvelle génération, qui grandissait ici, que de trouver dans les vestiges d’une guerre insensée un terrain de jeu, non seulement praticable, mais aussi idéal ?

Il se peut qu’une pointe de nihilisme ait piquée ma réflexion, mais était-ce déjà ou encore du nihilisme, lorsque notre fils le plus âgé, suite à une visite dans l’une des plus belles contrées de l’Angleterre, dans le Surrey, où il avait vécu chez de bons amis dans une villa avec un merveilleux jardin et une nursery classique – lorsque celui de trois ans, alors que le train d’Ostende entrait dans la gare de Cologne, crie soulagé : enfin les ruines ! Et tout nous fut clair : il était de nouveau chez lui, cette ville détruite était sa patrie et si nous faisons fi des subtilités poétiques et métaphysiques, nous devons bien nous y résigner : c’était aussi la nôtre.

Quelque chose encore parmi mes souvenirs : la poussière et le silence. Les particules poussiéreuses de la destruction pénétraient à travers tous les interstices, se déposaient dans les couches, les livres, les manuscrits, sur le pain et dans la soupe, elles étaient moulues dans l’air ; elles étaient un cœur et une âme. Des années à combattre en Hercule et Sisyphe, contre toute raison, ces quantités de poussière – comme une grosse ville sait la produire ; elle collait aux cils et aux sourcils, entre les dents et sur le palais et les muqueuses, dans les blessures – des années à combattre les immenses multitudes atomisées de mortier et de pierres –, et j’espère que vous entendez bien cela comme un hymne qui fut entonné, non comme une plainte : l’hymne à la nouvelle patrie faite de la poussière de l’héritage culturel.

La deuxième chose était – on ne dira rien du marché noir et du vol – le silence. Il était aussi impénétrable que la poussière, et seul le fait qu’il fût incomplet le rendait crédible et supportable. N’importe où, dans ces nuits au silence impénétrable, des pierres détachées s’effritaient ou un pignon s’effondrait ; la destruction s’accomplissait d’après la loi de la statique inversée, avec la dynamique de structures touchées au cœur et, parfois, on pouvait observer de plein jour un pignon s’affaissant lentement, presque naturellement, les interstices du mortier se dissolvant, se dilatant comme une toile – et des pierres crépitant.

La destruction d’une grosse ville n’est pas un processus arrêté comme une opération, elle progresse comme la paralysie, ça s’effrite partout, puis ça s’écroule. L’effondrement consenti, ni provoqué par une explosion, ni par toute autre forme de violence aiguë, d’un haut mur en pignon est un spectacle inoubliable ; à n’importe quelle seconde, non prévisible, en aucun cas calculable, la belle structure, mise en place et assemblée en confiance et avec envie, cède ; ça sonne, dans un tic-tac presque inaudible, crépitant, le compte à rebours de la date de son édification à zéro – de même lors d’un tir de roquettes ; c’est décompté au néant – et ça s’arrête. C’était notre nouvelle patrie et nous l’acceptions. Plus tard, lorsque nous avons vu des villes épargnées, des sueurs froides arrivèrent ; encore plus tard ensuite, lorsque nous avons pu aller non pas dans l’inconnu, mais à l’étranger, on ressentit ce qu’on avait soupçonné. Je voudrais maintenant l’exprimer en anglais : It was not very pleasant to be a German – and it still not is [11].

Que nous étions allemands nous a été trop évident avant 1933 pour que nous ayons eu beaucoup à y réfléchir : ça nous était également trop manifeste, nous en étions si convaincus car, quoiqu’on en dise, le mot « Deutsch » est né probablement dans le triangle entre Aix la Chapelle, Mainz et Cologne. Nous étions pour ainsi dire allemands sans y songer, écrivions, lisions l’allemand et ne le prenions pas trop au sérieux. À quel point il pouvait devenir d’un sérieux effroyable d’être allemands nous avons eu à le ressentir en 1933 et en 1945 et bien sûr entre ces deux dates.

Quelqu’un m’aurait demandé avant 1933 quels éléments caractéristiques m’auraient défini – ainsi qu’une possible existence d’auteur –, j’aurais probablement nommé trois éléments dans l’ordre suivant : le Rhin, Cologne et le catholicisme, ce dernier était au moins aussi ambivalent au jeune homme de seize ans qu’il ne l’est à celui de cinquante-six ans [12] . Nommer l’allemand comme élément caractéristique d’une existence culturelle ne me serait pas venu à l’esprit : c’était par trop évident.

Le luxe de se distancer des Allemands pendant les années d’entre 1933 et 1945, intérieurement et, toujours, lorsque ce fut possible et nécessaire, extérieurement, nous l’accorderons ensemble à quelqu’un âgé de vingt à vingt-cinq ans en ces temps de crise – ce luxe, je ne l’ai laissé de côté qu’en 1945, lorsque intérieurement et extérieurement plus rien ne m’a empêché d’en être un – laissé de côté aussi en raison de l’opportunisme d’autres qui ont fait soudainement comme s’ils n’en étaient pas.

Je suis allemand et, en tant que tel, je souhaite au congrès un bon déroulement et remercie la ville de Jérusalem pour son hospitalité, comprise dans notre héritage culturel à tous.

Traduit par Pierre Malherbet

Wenn man für unser Jahrhundert einmal einen Namen suchen wird, wird man es wahrscheinlich das Jahrhundert der Vertriebenen und der Gefangenen nennen, und wenn man dann anfangen wird, die Vertriebenen und Gefangenen – weltweit versteht sich – in ihrer Zahl zu erfassen, wird man auf eine Anzahl von Menschen kommen, mit denen man ganze Kontinente hätte bevölkern können. Wahrlich ein Jahrhundert der Rekorde. In vergangenen Jahrhunderten kam man, wenn man versuchte, die Menschen in .ihrer Anzahl zu erfassen, die durch Schlachten, Eroberungen und auch Vertreibungen betroffen waren, auf Ziffern, die der Größe einer Stadt oder einer Region mittleren Umfangs entsprachen: ein vernichtetes Dorf, eine zerstörte Stadt ging schon in die Mythen ein und wanderte durch die Märchen.·In unserem gesegneten Jahrhundert sind es immer gleich Millionen: sechzig Millionen Opfer des Zweiten Weltkriegs allein in Europa, sechs Millionen europäische Juden ermordet, auf vierzig Millionen Tote schätzt man die Opfer Stalins allein in der Sowjetunion, und wenn ich solche Zahlen ausspreche, muß ich schon zittern vor dem, der es besser weiß oder zu wissen glaubt und mir widerspricht, indem er feststellt: Nein, es waren nur vier· nur fünfzig, nur fünfunddreißig Millionen – oder es kommt ein anderer, der mir vorrechnet, daß es mehr waren: siebzig, sieben, fünfundvierzig Millionen.

So drückt sich der Geist unseres Jahrhunderts in fürchterlichen Auseinandersetzungen um runde Zahlen aus; hinter all diesen abgerundeten Zahlen verschwand der einzelne immer mehr, bis er unsichtbar wird im Dickicht rivalisierender Statistiken. Wenn ich lese, daß zum Schutz des amerikanischen Präsidenten in Tokio 160 ooo Polizeibeamte aufgeboten waren – und das anläßlich eines Besuches, dem man fast nur symbolische Bedeutung zusprach – und daß mehr als eine Million Menschen beim gleichen Anlaß demonstrierten und drei Millionen streikten; daß also anläßlich dieses symbolischen Besuchs mehr Menschen mobilisiert waren, als Israel Einwohner hat: wird da nicht jegliche Form der Fiktion, und sei es im aufwendigsten Gruselfilm, zur lächerlichen Farce angesichts der Wirklichkeit?

Können wir große Zahlen, mit denen Menschen erfaßt werden, noch begreifen? Und gibt es da nicht noch etwas fürchterlich Neues: eine internationale Rivalität, die sich ausdrückt in einer wahnsinnigen Konkurrenz, die da sagt: Nein, nein, wir haben die meisten Toten gehabt, mehr als ihr, wir haben mehr Vertriebene, mehr Gefangene als ihr. Wie werden wir mit dieser fürchterlichen Art moderner Opfer-Buchführung fertig, in der Tote zu Kapital werden? Und wenn dann noch ideologische oder weltanschauliche Interpretation hinzukommt, die sich anmaßt, die Toten, die Vertriebenen, die Gefangenen in gerechterweise und ungerechterweise Betroffene zu unterteilen, indem man von „notwendigen Maßnahmen“, „unvermeidlichen Korrekturen und Opfern“ spricht, dann werden die Friedhöfe, sichtbare und unsichtbare, fast zu Börsen, an denen Tod und Vertreibung gehandelt werden.

Befreie ich die Vertriebenen und Gefangenen von der ideologischen Verkleidung, in der sie zum Spekulationsobjekt, zur demagogischen Reserve in Lagern werden, und suche ein Wort für die internationale Gleichheit ihres Zustandes, so fällt mir kein besseres Wort ein als das deutsche Wort Elend, eine Urahne des Wortes Ausland, aber nicht im touristischen Sinne zu verstehen, nicht im Sinn von im Ausland leben, ins Ausland fahren, sondern im Sinne von in der Fremde, fremd, ein Fremder sein, dessen Elend noch an irgendeiner Börse für internationale Interessen gehandelt wird.

Nun gibt es eine geistesgeschichtliche Tradition, die dieses Fremdsein metaphysisch interpretiert: sind wir nicht alle fremd auf dieser Erde? Fremd im eigenen Land, in der eigenen Familie, und gibt es da nicht Augenblicke, wo einem die eigene Hand so fremd wird wie die eigene Wohnung? Und fängt nicht überhaupt die Menschheitsgeschichte mit Vertreibung – aus dem Paradies – an und ist nicht Vertriebenheit der uns angemessene und zugemessene Dauerzustand?

Ich glaube nicht, daß nur Dichter, Denker, Gottesgelehrte so empfinden – sie sind nur glücklicher als die anderen, weil sie ihrer Fremdheit Ausdruck verleihen können. Ich will diese metaphysische und so dialektische wie poetische Dimension des Vertriebenseins weder leugnen noch verleugnen, ich frage mich nur, ob wir, die wir uns Autoren und Intellektuelle nennen, noch teilhaben sollten an diesen beiden Spielen, dem einen, dem Börsenspiel, bei dem man das Elend in politisches Kapital zu verwandeln sucht, und dem anderen, dem metaphysisch – dialektisch – poetischen Spiel?

Ich weiß keine Antwort auf diese Frage, ich stelle sie nur. Und ich setze dabei voraus, daß wir – zwischen diesen beiden Spielen stehend – nicht nur aus dem eigenen Volk vertrieben und heimatlos werden können, sondern beides auch im eigenen Volk und innerhalb seiner staatlichen Organisation. Ich zitiere den russischen Dichter Jossif Brodski, einen Vertriebenen: „Sprache ist etwas viel Alteres und Unvermeidlicheres als der Staat. Ich gehöre zur russischen Sprache. Was den Staat betrifft, ist meiner Meinung nach das Maß der Vaterlandsliebe eines Schriftstellers nicht der Eid von einer hohen Plattform, sondern die Art und Weise, wie er in der Sprache der Menschen schreibt, unter denen er lebt.“

Wenn wir hier in Jerusalem über „Kulturelles Erbe und die schöpferische Kraft in der Literatur unserer Zeit“ sprechen, so erscheint mir dieses Zitat fast wie ein Motto. Denn ich könnte mir vorstellen, daß der erste jüdische Staat, Israel, in der zweitausendjährigen Geschichte der Vertreibung des jüdischen Volkes als neues Element im kulturellen Erbe, eine neue Dimension in die jüdische Literatur bringt, möglicherweise auch Probleme, die ich nicht beurteilen, aber ahnen kann. Es war gewiß kein Zufall, daß das israelische PEN-Zentrum auf die Idee gekommen ist Tradition und Gegenwartsliteratur zum Thema eines Kongresses zu machen, und so ist dieser Kongreß an diesem Ort hier gut aufgehoben. Es gibt da noch ein deutsches Wort, von dem ich nicht weiß, ob es übersetzbar ist, es ist das Wort bodenlos. Das jüdische Volk ist seit seiner Vertreibung bodenlos gewesen, aber sprachlos nie, und was es zusammengehalten und seine Kultur ausgemacht hat, ist vor allem die Überlieferung der Texte gewesen, und so war es in seiner Sprache immer zu Hause.

Und es gibt da noch eine grausame Voraussetzung, daß der, der die Vertreibung und die Angst vor ihr kennt, in den grausamen Zwang gerät, andere zu vertreiben, auf der Suche nach einer neuen Heimat andere in jenen Zustand versetzt, dem er gerade entgangen ist. Völkerwanderung, das klingt so freundlich, weil Wandern und Wanderung so friedliche Wörter, Worte sind. In Wahrheit war Völkerwanderung immer auch Völkerverdrängung, das ging nie ohne Gewalt, da wurde verschleppt, mitgeschleppt, zurückgelassen; klimatisch-geologische oder politische Verschiebungen waren immer die Ursache – und dieser Traum der Völker, die aus Nacht und Nebel des Nordens in die südliche Sonne wollten.

Und was brachten die Verdrängten, die andere verdrängten, mit: ihren Gott, ihre Götter, ihre Götzen – und ihre Sprache. Sprache ist das leichteste Gepäck – und eine schwere Last, wenn man in die Fremde kommt, und mitnehmen kann man fast immer nur, was man im Kopf und im Herzen hat: die Mythen und Märchen, die Erinnerungen, eigene und die Erinnerungen anderer, mit denen man die Sprache gemeinsam hat. Es ist ja kein Zufall, daß jede Unterdrückung mit der Unterdrückung der Sprache anfängt – und damit auch der Unterdrückung der Literatur, wenn man unter Literatur nicht ausschließlich das Geschriebene versteht. Es gibt Beispiele genug: das irische Volk, das jüdische, das polnische; und arme Völker wie die genannten, die ständig Unterdrückung erleiden mußten und erleiden müssen, oder wie das jüdische Volk ständig mit dem Stab in der Hand auf der Schwelle ihres Hauses in Angst vor Pogromen und Vertreibung leben mußten, sind nur in ihrer Sprache aufgehoben.

Wir Deutsche – auch nie ein sehr reiches Volk, wohl zum ersten Mal in unserer Geschichte an der Schwelle eines gewissen Wohlstandes, das macht so vieles an uns und für uns so problematisch wie mißverständlich – wir haben unserer Sprache erst sehr spät in unserer Geschichte die volle Ehre erwiesen, und wir verdanken den endgültigen Besitz unserer großen und schönen Sprache der Bibelübersetzung des Martin Luther, und wir sind nicht das einzige europäische Volk, dem die Unermeßlichkeit der Bibel im strengsten Sinn des Wortes ihre eigene Sprache erst erschloß und sie aus der Unterdrückung durch ein vertrocknetes Latein befreite.

Die Verächtlichkeit den Deutschen gegenüber entdeckte ich neulich im Dialekt meiner Heimat an dem Wort „verdötscht“, was so viel bedeutet wie blöd, dumm oder auch, um es jiddisch auszudrücken, ungefähr die Bedeutung von meschugge hat. Spät auch, vielleicht sogar zu spät, sind wir Deutsche auch Nationalisten geworden – desto gründlicher und gräßlicher wurden wir es, und, wie ich meine, desto gründlicher auch davon kuriert.

Und wenn ich nun als Autor zum Kongreßthema etwas sage, so kann ich es natürlich nur als Person und als solche unvermeidlieherweise persönlich. Ich muß auf das Material zu sprechen kommen, in dem ich mich – und nicht nur mich als Person – auszudrücken versuche. Denken wir einen Augenblick lang an den Zustand der Welt, Europas, Deutschlands im Jahre 1945. An den geschichtlichen Augenblick, in dem die zusammengeschmierte Blut-und-Boden-Lehre der Nazis sich auf eine fürchterliche Weise in ihrer Umkehrung verwirklicht hatte: der Boden ganzer Völker zerstört, das Blut von Millionen vergossen – und fast die Hälfte Europas bestand aus displaced persons.

Unsere Väter – ich muß hier gerechterweise meinen eigenen Vater ausschließen, der leidenschaftlich gern umzog – in ihrer naiven Seßhaftigkeit hatten uns den Spruch überliefert: dreimal umgezogen ist soviel wie bankrott gemacht. Und nun war dieser „Umzug“ für unzählige Menschen zur permanenten Lebensform geworden, ob in Lagern, Wartesälen, Heimen, zerstörten Städten lebend – wir waren alle deplaziert – und nicht nur physisch. Ich erinnere mich ausgedehnter Gespräche über die Frage, ob man Kinder in einer zerstörten Großstadt aufwachsen lassen oder besser mit ihnen aufs Land ziehen sollte: würde der Anblick der totalen Zerstörung ihnen nicht schaden, wo die leibliche Existenz in einer zerstörten Stadt ohnehin kaum aufrechtzuerhalten war? Die Frage: zerstörte Stadt oder heil gebliebenes Dorf war eine ernste Frage, wo man doch ein wenig Boden unter den Füßen – und auch Heimat suchte.

Wir entschlossen uns, in das fast total zerstörte Köln zu ziehen, in dem es noch einige Erkennungszeichen des „kulturellen Erbes“ gab. Unsere Kinder wuchsen also mitten in den Trümmern auf, und – so frage ich mich heute – wurden sie, die Trümmer, ihr kulturelles Erbe? Erst viel später fiel mir ein und auf, daß die Trümmer ideale, wenn auch partiell gefährliche Spielplätze waren, weil man in ihnen beides spielen konnte: Aufbau und Zerstörung: Immerhin gab’s Steine, Mauerreste, Eisenträger genug, und nach wenigen Jahren wuchsen Bäume und Blumen in den Ruinen, und war es nicht das Recht eines neuen Geschlechts, das da aufwuchs, die Überreste eines wahnsinnigen Krieges wenigstens als Spielplätze nicht nur brauchbar, sondern ideal zu finden?

Es mag in meiner Überlegung ein Schuß Nihilismus gesteckt haben, aber war es noch oder schon Nihilismus, als unser ältester Sohn nach einem Besuch in einem der lieblichstenTeile Englands, in Surrey, wo er bei guten Freunden in einer Villa mit herrlichem Garten und einer klassischen Nursery gewohnt hatte – als der Dreijährige, während der Zug von Ostende in den Kölner Hauptbahnhof einfuhr, erleichtert ausrief: Endlich wieder Trümmer! Und wir begriffen: Er war wieder zu Hause, diese zerstörte Stadt war seine Heimat, und wenn wir uns aller poetisch-metaphysischen Tricks enthalten, so müssen wir zugeben: es war auch unsere.

Was noch zu meiner Erinnerung gehört: der Staub und die Stille. Der Puder der Zerstörung drang durch alle Ritzen, setzte sich in Windeln, Bücher, Manuskripte, aufs Brot und in die Suppe, er war vermählt mit der Luft, sie waren ein Herz und eine Seele. Jahrelang gegen alle Vernunft als Herakles und Sisyphus diese Unermeßlichkeit des Staubes zu bekämpfen, wie ihn eine zerstörte Großstadt hervorbringt; er klebte auf Wimpern und Brauen, zwischen den Zähnen und auf Gaumen und Schleimhäuten, in Wunden – jahrelang im Kampf gegen die atomisierten unermeßlichen Mengen von Mörtel und Stein –, und ich hoffe, Sie hören heraus, daß hier keine Klage, sondern ein Hymnus angestimmt wird: ein Hymnus auf eine neue Heimat, die aus dem Staub des kulturellen Erbes bestand.

Das andere war – schweigen wir von Schwarzmarkt und Diebstahl – die Stille. Sie war so unermeßlich wie der Staub, und nur die Tatsache, daß sie nicht total war, machte sie glaubwürdig und erträglich. Irgendwo bröckelten in diesen unermeßlichen stillen Nächten lose Steine ab oder stürzte ein Giebel ein; die Zerstörung vollzog sich nach dem Gesetz umgekehrter Statik, mit der Dynamik im Kern getroffener Strukturen, und manchmal auch konnte einer am hellen Tag beobachten, wie ein Giebel sich langsam, fast feierlich senkte, Mörtelfugen sich lösten, weiteten wie ein Netz – und es prasselten Steine.

Die Zerstörung einer großen Stadt ist kein abgeschlossener Vorgang wie eine Operation, sie schreitet fort wie Paralyse, es brökkelt allenthalben, bricht dann zusammen. Der freiwillige, weder durch Sprengung noch sonstige akute Gewalt bewirkte Einsturz einer hohen Giebelmauer ist ein unvergeßlicher Anblick; in irgendeiner, nicht voraussehbaren, schon gar nicht berechenbaren Sekunde gibt dieses schöne, geordnete, in Zuversicht und Lust zusammengefügte Gebilde nach; es zählt, fast unhörbar tickend, knisternd, vom Datum seiner Entstehung auf Null zurück – auch beim Abschuß von Raketen wird auf Null und Nichts zurückgezählt – und gibt sich auf. Das war unsere neue Heimat, und wir nahmen sie an. Später brach uns, wenn wir unzerstörte Städte sahen, der Angstschweiß aus, noch später dann, als wir nicht ins Elend, sondern ins Ausland fahren konnten, spürte man, was man geahnt hatte. Nun, ich möchte das englisch ausdrücken: It was not very pleasant to be a German – and it still not is.

Daß wir Deutsche waren, war uns vor 33 zu selbstverständlich gewesen, als daß wir viel nachgedacht hätten: es war uns auch zu gewiß, wir waren dessen zu sicher, denn wahrscheinlich ist ja das Wort deutsch ohnehin in dem Dreieck zwischen Aachen, Mainz und Köln entstanden. Wir waren sozusagen gedankenlos deutsch, schrieben, sprachen, lasen deutsch, nahmen das nicht so ernst. Wie fürchterlich ernst es werden konnte, deutsch zu sein, bekamen wir 1933 zu spüren und 1945 und natürlich zwischen diesen beiden Daten.

Hätte mich jemand vor 1933 gefragt, welche Elemente ich als bestimmend für mich und eine mögliche Existenz als Autor bezeichnen würde, so hätte ich wahrscheinlich drei Elementen in folgender Reihenfolge genannt: den Rhein, Köln und den Katholizismus, der für den Sechzehnjährigen mindestens so ambivalent war wie er für den Sechsundfünfzigjährigen ist. Das Deutsche als ein bestimmendes Element einer intellektuellen Existenz zu benennen, wäre mir nicht eingefallen: es war zu selbstverständlich.

Den Luxus, sich innerlich und wo immer möglich und notwendig auch äußerlich, sich von den Deutschen in den Jahren zwischen 1933 und 1945 zu distanzieren, wollen wir gemeinsam einem Zwanzig – bis Fünfundzwanzigjährigen in Notzeiten gestatten – diesen Luxus habe ich erst 194 5 abgelegt, als es drinnen und draußen nichts mehr einbrachte, einer zu sein – abgelegt auch angesichts des Opportunismus anderer, die plötzlich taten, als wären sie keine.

Ich bin einer, als solcher wünsche ich dem Kongreß einen guten Verlauf und bedanke mich für die Gastfreundschaft der Stadt Jerusalem, die in unser aller kulturelles Erbe einbezogen ist.

Par Heinrich Böll

Prix Nobel de littérature (1972), Heinrich Böll (1917-1985) est davantage connu, en France comme en Allemagne, pour ses romans et ses nouvelles que pour ses essais. Victime du nazisme, ballotté pendant sept ans sur tous les fronts au gré des infortunes de la guerre, « cet ersatz d’aventure », il fait partie de cette génération d’écrivains de la moralisation née dans une Europe sacrifiée sur l’autel de la Barbarie. Pour l’écrivain colonais, il s’agit en premier lieu d’interroger son passé, de se pencher sur les questions de la culpabilité et de la responsabilité – qu’à l’instar du soldat Beckmann, héros bien malgré lui de Draussen vor der Tür, on aimerait pouvoir refiler à son prochain pour s’en débarrasser. Mais il s’agit aussi, dans cette Allemagne déchirée de l’après guerre, de proposer une identité culturelle allemande, de répondre à la délicate question posée par Adorno : Was ist Deutsch ? Pas de choix, donc, pour Böll : témoin de son temps, révolté mais jamais révolutionnaire, il a le besoin impérieux d’en brosser un tableau, rarement reluisant. Il va au fond des choses, descend au plus profond de la psyché humaine et l’on reconnaît là le grand romancier – il cherche, dans ses essais, à appréhender la réalité. Bas les masques ! Riez, vous autres, dans la salle obscure de votre cinéma, les yeux rivés sur ce stupide écran, alors qu’il y a peu vous vous couchiez dans la terreur.
L’éphémère, le pittoresque, ça n’intéresse pas Böll : il lui faut davantage. Partant d’une observation simple, souvent de lui même, dans la plus pure tradition essayiste qu’il est allé glanée en France, c’est la vérité morale des évènements qu’il recherche dans ses essais, une vérité désincarnée de l’histoire. Il veut mettre en garde, il veut avertir ses contemporains face à cette déréliction qui les guette, souvent avec naïveté.
Écrire permet donc à Böll de rentrer de plain pied dans son temps. Mais chez l’écrivain catholique, nulle place pour le désespoir : l’humanité est corrompue, pourtant Böll ne veut qu’une chose : révéler l’homme à lui-même en s’intéressant, dans ses nouvelles, ses romans ou ses essais, aux destinées individuelles, à l’unicité de chaque être humain et à ses souffrances – et c’est là tout le sens et la beauté de sa démarche. Il écrit alors dans une langue simple, une langue dont il sait qu’elle pourra toucher le plus grand nombre, sans prétention ni recherche esthétique, engoncée, même, de temps à autre. Qu’on se rassure cependant, et qu’on me permette d’opposer à ceux qui pensent que l’œuvre de Böll mourra lorsque les thèmes qu’elle traite seront tout à fait obsolètes, cette phrase de Reich-Ranicki : « tant qu’il y aura une littérature allemande, on se souviendra de lui avec respect et gratitude ». Je crois qu’il y a là quelque chose de vrai, et, lire pour la première fois ces quelques essais en langue française en est la preuve.
Pierre Malherbet

Ce texte a paru sous le titre  Ich bin ein Deutscher dans Essayistische Schriften und Reden III, 1973-1978, Kiepenheuer und Witsch Verlag, Cologne, page 175.

Pierre Malherbet est venu à la traduction au cours de ses études de littérature comparée à dominante franco-allemande.

Depuis, il traduit de l’allemand vers le français pour différents éditeurs. De la littérature contemporaine pour Gallimard (Ferdinand von Schirach), des classiques pour Pocket (Stefan Zweig), de la littérature jeunesse pour Fleurus (Heidi), des ouvrages de typographie pour B42, etc.

Parallèlement à cette activité, il a travaillé chez différents éditeurs en France (Calmann-Lévy, 10/18) et en Allemagne (Suhrkamp). Il est actuellement chargé d’activité éditoriale au Centre Pompidou.

Travaux de traduction :

Bruno Apitz, L’enfant de la valise, Denoël, 2014.

Heinrich Böll, Le Cheveu qui est tombé de la tête, éditions Alidades, 2009.

Heinrich Böll, Du risque d’écrire, revue Europe, n°936, 2007.

T.S. Eliot, L’unité de la culture européenne, La Revue des revues, n°43, 2009.

Dieter Gräf, Entretien au sujet de Rolf Dieter Brinkmann, Le Chemin des Livres, n°22/23, 2012.

Leopold von Sacher Masoch, La Vénus à la fourrure, Pocket, 2013.

Ferdinand von Schirach, Crimes, Gallimard, 2011.

Ferdinand von Schirach, Coupables, Gallimard, 2012.

Ferdinand von Schirach, L’Affaire Collini, Gallimard, à paraître (juin 2014).

Patrick Roth, Nuit de lumières, éditions Alidades, 2012.

Stefan Zweig, Le joueur d’échecs & Lettre d’une inconnue, Pocket, 2013.

Stefan Zweig, 24 heures de la vie d’une femme & Voyage dans le passé, Pocket, 2014.

[1Das Elend : la misère – du moyen haut Allemand « ellende », du vieil haut Allemand « elilenti » qui signifient l’autre pays, le chagrin, la détresse.

[2Das Ausland : le pays étranger.

[3Bodenlos : sans terre

[4Die Völkerwanderung : la migration, mot à mot : la randonnée des peuples.

[5Das Wandern : la randonnée. Forme substantivée de « wandern » : faire une randonnée, par extension, migrer.

[6Die Wanderung : la randonnée.

[7Variation en Rhénan du verbe « verdeutschen » ou « eindeutschen » signifiant germaniser.

[8Du yiddish « meschuggo », de l’hébreu « mĕšuga ». L’adjectif « meschugge » est passé dans l’usage courant en Allemand est signifie « cinglé », « doux dingue ».

[9À considérer chez Böll non pas dans son sens négatif mais dans le sens d’une commune volonté de vivre ensemble exprimée par les différents ressortissants du même peuple. « Personne […] favorable à la constitution de sa communauté en tant que nation. » dictionnaire Trésor de la langue française.

[10En Anglais dans le texte

[11En Anglais dans le texte.

[12Böll a seize ans en 1933, cinquante-six lorsqu’il prononce le discours.