Il poema incessante

Me parlais-tu à moi ?

Avant même que tu ne bondisses

sur mon cœur pour l’avaler

sur moi j’ai senti tes yeux étirés. Tu éclatais parfois de rire

illuminant l’instant

mais notre destin tu l’avais déjà écrit.

Je ne t’ai pas coloré, comme tu le voulais,

le ciel de bleu.

Les nœuds douleur pour le cerveau

tu les niais dans tes rires ton inaptitude.

Passer du français à l’italien

à l’espagnol

en modulant l’accent et l’intention

n’est qu’une ondulation de l’épine

dorsale féline

l’égratignure prodiguée délibérément.

À qui parlais-tu ? Me parlais-tu à moi ?


Europe poétique

Ô Europe,

mère des hommes et femmes philosophes,

mère des langues que je connais

dans les sons indo-européens,

hongrois et slaves,

figure paternelle de celles que je parle

au summum de mes forces.

Quand l’une d’entre nous prend son envol,

elle est rapidement déviée sur des lunes

abaissées ou au ras du sol, vies stériles,

amours ternes, sources d’abreuvement

asséchées. Les langues se sont racornies.

Trésor, sois mon trésor,

tu ne t’es pas laissée assassiner

dans ta beauté, visionnaire

guerrière, migrante à la crinière abondante.

Toute ta passion s’envole

et il reste toujours la présence des ancêtres,

la forêt avant la déforestation,

la resémantisation des lieux.

Tu enrichis ton langage, et à l’intérieur que soit

tout ce qui n’arrête jamais de parler,

notre principe, cette lumière, l’envol...


Le déluge universel

devant la fresque de Paolo Uccello

La nature pleine

du bain nocturne

l’eau monte

la pensée sagace se déverse à jamais.

Nature cruelle

et déluge charrient ensemble

les humains serpents autour du cou

et les cadavres enflés

à la dérive dans le flux

de mon maître métaphysique.

Dans l’instabilité dans le déséquilibre

le corps peint vit

dans un noir de corbeau

se détachant sur fond noir

how came beauty against this blackness

quelle splendeur originelle...

Dans le déluge universel se tiennent

les idolâtres des jours efflanqués

à jamais nains à jamais ignares.

Les fines herbes du jardin du maître

ravivées par le bain nocturne

sapiential.


Enfance

Là où s’est terminé

le rêve de la nuit ingénue

cédait le plafond-sol

« ... un navire est arrivé... »

un soubresaut, la petite mort.

Nous créions, par instinct, le détachement.

l’instant d’une conversion.

Pour des cycles et des romans et des chansons de geste

on apprenait en observant.

Le démon venait là croissant comme une larve

sombre au sein d’une toile.

On nous avait déjà prévenus

de l’inconsistance des générations.


La neige

Ce fut durant ces hivers dans la maison

entre les toits et les rafales, ce fut la neige,

je la sentais en moi avant même de la voir

grâce au silence blanc, neige se tassant,

comme quelqu’un se taillant les veines, engourdissement.

Vint la vision d’en bas, à travers la lucarne.

La neige des grands-parents qui nous changent en prophètes

rien autour n’est plus sale.

La neige du père s’engouffrant dans l’entrée :

ses pas sourds vers une nouvelle journée

et les autres encore tout à leur sommeil

s’accrochant à la vie.

La pluie de la mère

faisant tinter les verres

réchauffant le ventre,

réchauffant les os.

La neige : toujours « viens », jamais « va-t-en »,

ou « pars », non, viens près de moi

comme un vrai parent

le parent que tu as toujours été

dans le couloir, dans la chambre, dans le noir,

au moment de se déshabiller

tendre l’oreille vers les voix suaves

belles et persuasives.

Tout est calme, tout est à nous

le silence blanc du père, avec nous.


Traduit par Sabine Huynh

A me, parlavi ?

Sentivo il tuo sguardo asiatico

prima che ti avventassi al mio cuore

per masticarlo. Scoppiavi a volte

in riso, gettavi una schiarita,

ma un destino hai creato.

Non ti ho azzurrato, come volevi,

il cielo.

L’intreccio che al cervello è dolore,

Negavi nel ridere, nel non far capire.

Passare dal francese all’italiano

allo spagnolo

modulando accento e intenzione

è solo movimento spinale raffinato

del gatto

è il graffio dato con intenzione.

Con chi parlavi ? A me parlavi ?


Europa poetica

O Europa madre dei filosofi delle filosofe

madre per le lingue che conosco

nei suoni indoeuropei

e negli ungri suoni e slavi,

paterna per quelle che parlo

al meglio delle mie forze.

Quando una di noi prende il volo

sveltamente deviata su lune

più basse o raso-suolo, su vite

sterili, amori a-passionali

asciugate sorgenti all’ abbeveraggio,

diventano piccole le lingue.

Tesoro, sei il mio tesoro,

non ti sei lasciata ammazzare

nella tua belleza, visionaria,

guerriera, migrante dalla ricca chioma.

Tutta la tua passione vola,

e c’è la presenza sempre degli avi,

la foresta prima della deforestazione

della rinominazione dei luoghi.

Amplia tu il linguaggio, e dentro ci sia

tutto ciò che non smette di parlare,

il nostro principio, questa luce, il volo...


Il diluvio universale

davanti al dipinto di Paolo Uccello

Al lavacro della notte la natura

s’impregna, aumenta il velo d’acqua

e mai si è interrotto il pensiero

sapienziale.

A corpo con la natura cruda

il diluvio travolge gli umani,

con serpi attorno al collo

ed enfiati cadaverini galleggianti

nel flusso,

del mio maestro metafisico.

Nell’instabilità nel disequilibrio

il dipinto corporale vive

da un nero come di un corvo

che si stacca da fondo nero

how came beauty against this blackness

quale splendore all’origine...

In diluvio universale si tengono

gli idolatri dei giorni sfiancanti,

eterni nani, insipienti.

Il maestro ha erbe dei giardini

rinfrescati al lavacro della notte

sapienziale.


Infanzia

Nel punto in cui s’interrompeva

il sonno nella notte infantile

cedeva il soffitto-pavimento;

“... è arrivato un bastimento...”

un soprassalto, la piccola morte.

Creavamo, per istinto, il distacco.

Istante di una conversione.

per cicli e romanzi e chansons de geste

si imparava per emulazione.

Il demone veniva là iniziando

come il bruco buio nella tela

Ci eravamo già allora avveduti

dell’ inconsistenza delle generazioni.


Neve

Fu in quegli inverni nella casa

tra tetti e stormi, fu neve,

la percepivo in me prima di vederla,

per il silenzio bianco che si crea,

rallentamento come di uno che si svena.

Poi, la visione dal basso, al finestrino.

La neve dei nonni che ci fa profeti

quando niente intorno è sordido.

Neve del papà che passava nell’androne :

era il passo del babbo che deve

andare via e gli altri ancora

stanno al dormire e non perire.

La pioggia della mamma passa

per il tintinnio di un bicchiere,

ha a che fare con la pancia,

ha a che fare con le ossa.

Neve è tutto un « vieni », mai un « vai via »,

« parti », no, vieni accanto a me,

come un genitore vero,

come il genitore che c’è sempre stato,

nel corridoio, nella stanza al buio,

al momento di svestirsi,

porgendo orecchio alle belle voci,

alle voci belle e convincenti ;

tutto è calmo, tutto è nostro,

poi il silenzio bianco del papà aiuta.

Par Claudia Azzola